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Les bibliothèques ont raté le rendez-vous de l'accessibilité numérique (30/09/2014)

Date de mise en ligne : 30/09/2014.

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Documentation

Les équipements de lecture publique vont devoir faire un gros effort pour hisser leurs sites web au niveau d'exigence requis par la loi 2005-102 du 12 février 2005 sur l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, dite loi « handicap » et des décrets qui en découlent. Non seulement, les bibliothèques ne sont pas en conformité avec ces obligations légales et réglementaires, mais, de surcroît, elles en ignorent une bonne partie. C'est ce que révèle une étude réalisée cet été par Tosca Consultants, société de conseil en système d'information et documentation, et Franck Touré (pixFL), société de conseil en accessiblité numérique, en collaboration avec l'association BrailleNet et le ministère de la culture.

[Photo : plage braille connectée à un PC, CC BY-SA, 3.0]

Le premier volet, quantitatif, de cette analyse a été publié le 25 septembre 2014. Le second volet (qualitatif) doit être publié en décembre de cette année.

Les analystes ont passé au crible les sites web d'un échantillon de 130 bibliothèques constitué à partir de la base de données de l'Observatoire de la lecture publique (ministère de la culture). Il s'agit de :

  • 80 bibliothèques municipales
  • 40 bibliothèques intercommunales
  • 10 bibliothèques départementales de prêt (BDP)

En complément, les analystes ont étudié les sites de la Bibliothèque publique d'information (Bpi), la Bibliothèque nationale de France (BnF), et des bibliothèques de la Ville de Paris.

Quelles sont les obligations des bibliothèques ?

La loi « handicap » stipule que "les services de communication publique en ligne des services de l'État, des collectivités territoriales et des établissements publics qui en dépendent doivent être accessibles aux personnes handicapées. "

De plus, le décret n°2009-546 d'application de la loi « handicap » oblige les administrations françaises à se référer au Référentiel Général d'Accessibilité des Administrations (RGAA) pour attester de la conformité de leurs services en ligne aux standards WCAG 2.0, selon les niveaux A et AA. Ce, avec des dates butoir : mai 2011 pour l'Etat, mai 2012 pour les collectivités.

Or l'étude pointe de sévères carences.

Quels sont les constats ?

Sur l'ensemble des portails étudiés

  • aucun - même ceux des plus grandes bibliothèques - n'avait fait l'objet d'une attestation de conformité au moment de l'enquête
  • la connaissance des obligations restent « très partielles »
  • ce retard tient autant à une méconnaissance de ces obligations (ou de priorité) que de moyens. Preuve en est, avancent les auteurs de l'enquête : «les grandes bibliothèques (bibliothèques nationales, BDP, équipements de grandes villes, de grands EPCI) ne sont pas plus avancées », et « ne donnent pas l'exemple.»
  • sur l'échantillon, 20 bibliothèques seulement sont engagées dans une politique d'accessibilité numérique, avec une page du portail présentant cette démarche.

En outre, les auteurs dénoncent :

  • un parc « vieillissant », voire « rudimentaire » pour les plus petites structures
  • trop de gadgets pour ceux qui proposent des fonctionnalités d'accessibilité. Les enquêteurs y voient la main des éditeurs de solutions qui s'en servent de prétexte à l'accessibilité.

L'étude relève cependant deux motifs d'espérer une amélioration prochaine :

  • la fréquence des doubles-sites (un site éditorial, un autre réservé au catalogue), pratique qualifiée « d'approche intéressante »
  • l'utilisation, pour la partie éditoriale, de CMS (content management systems) standards ayant montré leurs avantages en matière d'accessibilité (Wordpress, Drupal, Joomla)

Quelles sont les préconisations des auteurs ?

  • La sensibilisation et la formation des agents. Les auteurs évoquent le rôle central que peuvent jouer les BDP... à condition, précisent-ils, qu'elles-mêmes disposent d'un site accessible. Même chose pour les éditeurs de solutions, à condition qu'ils suivent de près la réglementation et exercent une forme de contrôle sur les outils proposés, par exemple, par le biais de clubs d'utilisateurs. Par ailleurs, ces questions pourraient être intégrées à la formation initiatle des élèves-conservateurs.
  • La valorisation de sites de référence.
  • La rédaction de cahiers des charges de manière "directive" sur les attentes des bibliothèques pour leurs sites en matière d'accessibilité. "Les responsables de bibliothèque doivent être également alertés sur la nécessité de contrôler les engagements pris par les fournisseurs", précisent les auteurs.

Les résultats détaillés de ce premier volet de l'étude sont en ligne sur un mini-site dédié. Outre les résultats, on y trouve des informations sur les standards en matière d'accessibilité numérique, ainsi que des lieux et acteurs «ressources» pour la mise en œuvre d'un projet en faveur des internautes handicapés. Enfin, on y lira avec grand intérêt les «contre-vérités largement répandues en matière d'accessibilité»...A consulter également :

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