La nomination de tout décoré dans les ordres nationaux est l’aboutissement d’un long processus qui fait intervenir de multiples relais selon un calendrier précis. Un strict partage des rôles est au cœur de la procédure.
A - Les six étapes de l’attribution
1. La prospection
Deux canaux sont activés pour proposer aux préfets des candidatures de personnalités qui pourraient être décorées.
Traditionnellement, les maires, les parlementaires, les cabinets ministériels et des territoriaux, mais également les acteurs économiques et associatifs sont mobilisés tout au long de l’année pour identifier les futurs décorés.
Depuis 2008, tout citoyen, avec le soutien de 50 signataires du même département, peut déposer directement en préfecture un dossier pour distinguer une personne qu’il estime méritante (voir mémoire plus bas).
Les préfets font ensuite remonter les informations aux ministères concernés par les profils sélectionnés.
2. La proposition
Seuls les ministres sont habilités à proposer des personnes pour nomination et promotion. Les contingents sont particulièrement restreints notamment pour l’ordre de la Légion d’honneur dont le nombre de récipiendaires est déterminé par le président de la République pour des périodes de 3 ans.
Légion d’honneur : des contingents restreints |
Pour les ressortissants français, les contingents de croix de l’Ordre national de la Légion d’honneur pour la période du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2023 sont fixés à 2 365 croix par le décret n° 2021-240 du 3 mars 2021 : À titre civil - 1 155 chevaliers - 150 officiers - 35 commandeurs - 7 grands officiers - 3 grands-croix Total 1 350 croix. À titre militaire - 775 chevaliers - 196 officiers - 36 commandeurs - 5 grands officiers - 3 grands-croix Total 1 015 croix Pour les ressortissants étrangers, le contingent de croix de l’Ordre national de la Légion d’honneur pour la période du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2023 est fixé à 285 croix par le décret n° 2021-241 du 3 mars 2021. Pour les étrangers, le ministre des Affaires étrangères est seul habilité à présenter des dossiers de nomination et promotion. Il s’appuie sur les ambassadeurs pour identifier les futurs décorés. La cérémonie de remise d’insigne n’est ici pas obligatoire. |
Les décorés reçoivent du grand chancelier une lettre de félicitations et d’explication des démarches à réaliser.
Ils doivent ensuite organiser leur cérémonie de remise d’insigne, indispensable pour entrer dans l’ordre de la Légion d’honneur.
Les ministères établissent pour chaque personne un dossier de proposition qu’ils adressent au grand chancelier de la Légion d’honneur. Il comprend un exposé détaillé des activités professionnelles et des engagements (électifs, associatifs…), une liste des publications éventuelles, un extrait du casier judiciaire, une enquête d’honorabilité et l’avis du ministère.
3. L’examen des dossiers
Les services de la Grande Chancellerie vérifient les conditions réglementaires de la recevabilité et analysent les dossiers avant leur transmission aux membres du Conseil de l’ordre.
4. Les délibérations
Chaque membre du Conseil de l’ordre étudie les propositions qui relèvent de son domaine de compétence. Sous la présidence du Grand Chancelier, le Conseil de l’ordre se réunit chaque mois, il délibère et se prononce sur la recevabilité des dossiers au regard du Code et de la jurisprudence. Le Conseil écarte environ 15 % des propositions.
5. La décision
Le Grand Chancelier présente les propositions déclarées conformes au président de la République.
Le chef de l’État valide la liste définitive des décorés. En tant que grand maître, il peut alors retirer des noms, mais ne peut pas en ajouter.
6. La publication
Le président de la République signe les décrets de nomination et de promotion, qui sont ensuite publiés au Journal officiel. Les décorés reçoivent du Grand Chancelier une lettre de félicitations et d’explication des démarches à suivre.
B - Les six étapes de la cérémonie de remise d’insigne
1. Choisir son délégué
- Pour la Légion d’honneur : un membre de la Légion d’honneur, titulaire d’un grade au moins égal au vôtre.
- Pour l’ordre national du Mérite : un membre de l’ordre national du Mérite ou de la Légion d’honneur d’un grade au moins égal.
- Un membre du gouvernement ou un ambassadeur de France si on vit à l’étranger.
- Prendre contact avec la personne choisie.
- Aviser l’administration de la grande chancellerie du nom de cette personne afin que lui soit délivré le pouvoir de représenter le grand chancelier le temps de la cérémonie.
2. Choisir la date et le lieu de la cérémonie
Il est nécessaire d’attendre d’avoir reçu les documents réglementaires délivrés par la grande chancellerie avant d’arrêter la date de la cérémonie de réception.
La cérémonie peut se dérouler à votre convenance, dans un lieu public ou privé, et doit revêtir un style solennel dans le respect du prestige de l’ordre.
3. Acheter la décoration
C’est au récipiendaire qu’il appartient d’acquérir l’insigne mais il ne peut être porté qu’après la remise officielle.
Seule la Médaille militaire peut être portée dès la publication d’attribution au Journal officiel.
On peut s’adresser à la boutique de la Monnaie de Paris ou auprès du fabricant comme Artus Bertrand.
Les décorations sont en vente libre dans le commerce mais porter un insigne sans en avoir le droit fait l’objet de poursuites.
4. Préparer son discours
La cérémonie se déroule en trois temps :
- l’éloge du récipiendaire : le discours est prononcé par le délégué. Il s’agit selon l’usage de rendre hommage au décoré, de rappeler son parcours, ses valeurs et ses engagements, les mérites éminents pour lesquels il est distingué ;
- la remise de l’insigne : le délégué prononce la formule suivante fixée par le Code puis donne l’accolade au décoré :
« Au nom du président de la République et en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous faisons chevalier (officier ou commandeur) de la Légion d’honneur » ;
Ou « Au nom du président de la République et en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous élevons à la dignité de grand officier (ou de grand’croix) de la Légion d’honneur » ;
- la réponse du décoré : c’est pour le décoré le moment d’exprimer ses remerciements devant cette marque prestigieuse de reconnaissance et auprès de tous ceux qui ont compté dans son parcours.
5. Régler les droits de chancellerie
Vous devez vous acquitter des droits de chancellerie, redevables pour l’établissement de votre brevet.
Pour la Légion d’honneur, les droits s’élèvent à :
- 50 euros pour le grade de chevalier ;
- 75 euros pour le grade d’officier ;
- 100 euros pour le grade de commandeur ;
- 150 euros pour la dignité de grand officier ;
- 200 euros pour la dignité de grand’croix.
Pour l’ordre national du Mérite, les droits s’élèvent à :
- 30 euros pour le grade de chevalier ;
- 50 euros pour le grade d’officier ;
- 70 euros pour le grade de commandeur ;
- 100 euros pour la dignité de grand officier ;
- 150 euros pour la dignité de grand’croix.
6. Recevoir le brevet
Après la cérémonie, il faut veiller à adresser à la grande chancellerie le procès-verbal de la remise. Il convient que ce document soit daté et signé par le récipiendaire et son délégué afin que la date de réception dans l’ordre puisse être enregistrée.
En retour, le récipiendaire reçoit le brevet qui atteste son appartenance à l’ordre.
C - Porter l’insigne
1. La règle
D’une manière générale, on ne peut porter que les insignes des décorations dont on est titulaire, tant qu’ils sont réglementaires au moment où on les porte.
La question fut reposée en novembre 2019 par Sonia Krimi, députée de la Manche, à Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des Armées, afin de connaître les modalités envisagées par le Gouvernement pour introduire une disposition réglementaire permettant le port de la médaille par les enfants des anciens combattants.
La réponse formulée fut sans surprise : il n’est pas envisagé de modifier la réglementation.
Par ailleurs, l’article 433-14 du Code pénal énonce que le fait, par toute personne, de porter publiquement et sans droit une décoration réglementée par l’autorité publique est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
S’agissant plus particulièrement des ordres nationaux, l’article R.48 du Code de la Légion d’honneur, de la Médaille militaire et de l’ordre national du Mérite prévoit, pour sa part, que :
« Nul ne peut porter, avant sa réception, ni les insignes, ni les rubans ou rosettes du grade ou de la dignité auquel il a été nommé, promu ou élevé. »
2. L’exception
En effet, les descendants directs des Compagnons de la Libération sont autorisés à porter la croix de la libération de leur parent défunt.
Cette autorisation, accordée par la chancellerie de l’ordre de la Libération et avalisée par le conseil de l’Ordre (depuis le 21 janvier 1998) vaut dans trois circonstances :
- lors d’une cérémonie commémorative de l’Appel du 18 juin ;
- lors des cérémonies d’obsèques d’un Compagnon de la Libération ;
- lors d’une cérémonie officielle ayant pour but de donner le nom d’un Compagnon à une rue, une place ou un espace publique.
Dans ces circonstances, la croix de la Libération doit être portée obligatoirement sur le côté droit de la veste (contre le côté gauche pour tous les autres titulaires de décoration).
Pour toute question
- Pour la Légion d’honneur, Viara Vassilev : gestion.lh@legiondhonneur.fr ou 01 40 62 83 71
- Pour la Médaille militaire, Vanessa Ryckelynk : gestion.mm@legiondhonneur.fr ou 01 40 62 83 91
- Pour l’ordre national du Mérite, Nathalie Daguenet-Carré : gestion.onm@legiondhonneur.fr ou 01 40 62 83 97
Le Code de la Légion d’honneur (s’applique aussi à l’ordre national du Mérite) :
www.legiondhonneur.fr/fr/page/le-Code-de-la-legion-dhonneur/74