La Lettre du cadre territorial

Le magazine des professionnels de la gestion territoriale.

Accueil > Magazines > Lettre du cadre

La Lettre du Cadre Territorial

Un magazine à destination des cadres de la filière administrative qui balaye l'ensemble des questions managériales et décrypte l'actualité dans les domaines RH, finances et juridiques sur un ton impertinent, engagé et incisif.

Ajouter au panier Vous abonner (voir tarif )
(Règlement par CB, chèque bancaire ou mandat administratif)

A partir de :

129 €

Rythme et arythmie

Article du numéro 466 - 15 juin 2013

Repères

Il fallait réformer. Revenir sur une décision absurde qui avait, pour raison de convenances parentales et syndicales, supprimé une demijournée de classe par semaine dans l'enseignement primaire s'imposait. « Supprimer » cette suppression était logique et sain. Encore faut-il que les modalités adoptées servent correctement les finalités décidées. Et malheureusement,
il est difficile de concevoir un dispositif moins logique et moins sain.

Envoyer cette page à un ami

Donnez votre avis 2 commentaires 

Tous les articles du numéro 466

Télécharger cet article en PDF

L'écrit et le non-écrit

Déjà, le titre de ce texte réglementaire est très réducteur car il n'évoque que les questions de la durée hebdomadaire et du cadencement journalier de la semaine scolaire. Son contenu normatif est en effet des plus simples : la semaine doit compter 24 heures d'enseignement, total inchangé mais dorénavant réparti sur 9 demi-journées à raison de 5 h 30 maximum par journée et 3 h 30 maximum par demi-journée, avec une pause méridienne d'au moins 1 h 30. Rien de plus, le reste du texte traitant seulement des modalités consultatives et décisionnelles. Alors, pourquoi les communes devraient-elles intervenir en participant à l'organisation et surtout au financement de ce dispositif ? Parce que, de la conjugaison des données horaires fixées par le décret, il découle, sans que cela soit écrit, qu'en « compensation » de la création d'une nouvelle demi-journée de classe le mercredi ou le samedi matin, trois-quarts d'heure sortent du temps scolaire de chacun des autres jours. Il revient implicitement à la commune de prendre en charge ce temps non scolaire, mais se déroulant dans un bâtiment scolaire. C'est la deuxième donnée malsaine : puisque le financement communal de ces quatre plages de trois quarts d'heure découle d'un calcul arithmétique qui conduit à une intervention volontaire des communes, il n'est pas juridiquement réputé obligatoire - il eut fallu une loi pour cela. Rien n'oblige donc l'État à compenser budgétairement cette nouvelle charge, sans transfert juridique et responsabilité, et donc sans transfert de ressources. Et ceci à un moment où le gouvernement réduit les dotations aux collectivités et leur demande de réduire leurs dépenses. En troisième lieu, l'option ouverte par le décret de reporter son application à la rentrée scolaire 2014 a pollué les réflexions sur son entrée en vigueur, et risque de polluer à nouveau les débats lors des élections municipales, que l'on soit ou non dans une commune aux rythmes scolaires réformés. Et, pour l'heure, a abouti à une très faible application de ce nouveau dispositif à la prochaine rentrée scolaire. Sur le plan pratique, ces trois quarts d'heure peuvent permettre d'allonger la pause méridienne ou de raccourcir la journée scolaire. Bien entendu, les enseignants ne sont pas favorables à la première solution qui diminue leur durée de travail effectif, mais pas leur présence. La deuxième solution sert mieux leurs intérêts, mais peut conduire à raccourcir le temps vraiment scolaire tout en allongeant la journée.


Les enseignants et les parents d'abord

En tout état de cause, il faut revoir les modalités des activités péri-éducatives, les conditions d'intervention des associations sportives ou culturelles. Il faut recruter des éducateurs pour encadrer les enfants en périscolaires. Et comment trouver autant d'éducateurs - formés - en leur proposant de ne travailler que trois quarts d'heure par jour, quatre jours par semaine ? Et si des enseignants prennent en charge cette activité, leur rémunération complémentaire serait à la charge des communes... Enfin, que peut-on réellement organiser d'efficace pédagogiquement ou socialement en seulement trois quarts d'heure ! Les effets pédagogiques et sociaux de cette réforme risquent d'être singulièrement restreints alors même que son coût est très lourd. Sa mise en œuvre, contrairement à ses motivations, prend plus en compte les intérêts des enseignants ou des parents que des enfants. Elle génère un dispositif complexe d'enchevêtrement des responsabilités entre l'Éducation nationale et les communes. Surtout, elle n'améliorera pas le niveau scolaire dégradé des élèves du primaire et n'atténuera donc pas les fractures sociales, à la fois causes et conséquences de l'inégalité de formation enregistrée au seuil de l'enseignement secondaire. En somme, un processus arythmique car désordonné temporellement, financièrement, institutionnellement et intellectuellement.


Pour aller plus loin
« Rôle et responsabilité des communes dans l'aménagement des rythmes scolaires » (réf. DE604), un ouvrage de la collection Dossiers d'Experts des éditions Territorial http://librairie.territorial.fr
« L'aménagement des rythmes scolaires : outils » (réf. DE569), un ouvrage de la collection Dossiers d'Experts des éditions Territorial
http://librairie.territorial.fr

Formation d'experts
Refondation de l'Ecole
à Fort-de-France le 25/06
Plus d'informations au 04 76 65 61 00 ou par e-mail formation@territorial.fr