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Article du numéro 459 - 01 mars 2013
On attendait enfin un texte fondateur sur la décentralisation. On en est pour l'instant à une loi fourre-tout, sans vision. Nous sommes très loin d'une |
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our l'heure, il n'en est rien. En effet, les textes actuellement connus - qu'il s'agisse de l'avant-projet diffusé en novembre dernier ou de sa nouvelle présentation rédactionnelle de février 2013 - ne répondent en rien ni aux attentes ni aux besoins.
Pourquoi ?
Vue d'ensemble, d'abord : composé d'éléments disparates, allant de la création de métropoles à la démoustication - présentée en outre comme un élément structurant de la réforme de l'État ! -, il n'est en rien fondé sur une analyse institutionnelle débouchant sur une vision et une organisation claire et dynamique de la République territoriale de demain.
Il eut mieux valu proposer au législateur d'adopter en premier lieu un texte présentant un échange structurant de l'architecture des pouvoirs publics, comme en 1982, ultérieurement accompagné d'autres textes, thématiquement déclinés. Quelle logique y a-t-il, en effet, à traiter conjointement de la régionalisation, de la coopération intercommunale et de la gouvernance des agences régionales de santé ?
Quant au contenu des articles de ce projet, il suscite de très nombreuses exclamations ou interrogations. Comment qualifier autrement que de structure poly-synodique le futur Haut conseil des territoires mêlant, au niveau national, membres du gouvernement - le Premier ministre en tête -, parlementaires et élus territoriaux, et, au niveau régional, la conférence territoriale de l'action publique, cogérée par le président du conseil régional et le préfet ? En outre, l'intervention de la première de ces deux nouvelles instances pose la question constitutionnelle du rôle du parlement par rapport à la validation ou au rejet par ce haut conseil d'un projet législatif.
En matière de répartition de compétences, si le texte comporte quelques avancées, sa rédaction reste parfois frileuse - ainsi la compétence des régions en matière de formation professionnelle continuera à s'exercer « sous réserve des compétences de l'État » -, limitée (dans le secteur de l'énergie, par exemple) ou embrouillée, et ne débouche pas sur le retour tant souhaité de l'application du principe des « blocs de compétences ». Pire : aucune avancée en ce qui concerne un éventuel pouvoir réglementaire des régions, dont les schémas ne seront même pas prescriptifs. Et la création d'un véritable couple État-région, seule voie pour enfin reformer l'État n'est en rien pensée et organisée.
La disparition de certains départements n'est pas à l'ordre du jour, et les transferts de responsabilités des conseils généraux vers le niveau intercommunal ne sont qu'optionnels et ne sont pas envisagés de façon différenciée suivant les territoires concernés.
Tel est l'essentiel du contenu des textes actuellement en cours d'élaboration. Est-il encore possible de modifier la donne actuelle, afin de ne pas rater un rendez-vous fondamental avec l'histoire, comme en 1789, 1801, 1964 et 1982 ? On peut l'espérer mais il est difficile d'y croire car, ainsi que l'écrivait André Siegfried commentant la constitution de la IVe République, « un habit mal coupé se corrige difficilement à l'essayage ».