Le magazine des professionnels de la gestion territoriale.
Un magazine à destination des cadres de la filière administrative qui balaye l'ensemble des questions managériales et décrypte l'actualité dans les domaines RH, finances et juridiques sur un ton impertinent, engagé et incisif.
|
A partir de : |
![]() |
Article du numéro 452 - 01 novembre 2012
La crise du logement social est telle que le gouvernement envisage la création d'un super-PLAI pour loger les ménages les plus exposés. L'Union sociale pour l'habitat est prête à mettre en oeuvre des « logements sociaux accompagnés ». Tous les articles du numéro 452 |
Télécharger cet article en PDF
En clôture du 73e congrès HLM de Rennes, le 27 septembre, Cécile Duflot, ministre du Logement et de l'Égalité des territoires, a assuré qu'elle réfléchissait à la création de logements HLM spécifiques «pour les ménages les plus fragiles pour lesquels le parc social neuf n'est pas accessible» et souhaite «que soit étudiée la possibilité de mettre en place un super-Plai» (prêt locatif aidé d'intégration).
Dix mille logements de ce type verraient ainsi le jour, sur les 150 000 prévus par le gouvernement. Pour y parvenir, l'État renforcerait ses subventions et des prêts super-bonifiés de la Caisse des dépôts et consignations seraient consentis aux organismes HLM, précise-t-on dans l'entourage de la ministre. «Cette bonification des prêts de la CDC peut venir de la rémunération des fonds d'épargne mais aussi de la diminution du coût du commissionnement du réseau bancaire pour la collecte du livret A», indique de son côté Marie-Noëlle Lienemann, présidente intérimaire de l'Union sociale pour l'habitat (USH) qui regroupe les 761 organismes HLM. Cette dernière a fait ses calculs : «Une baisse de 20 points de base des taux des prêts de la CDC au logement social pourrait rapporter un équivalent-subvention de 400 millions d'euros».
Cécile Duflot poursuit donc sur sa lancée pour rééquilibrer un secteur du logement soumis à la fois à la dureté de la crise et à la nécessité d'être soutenu, tant dans le public que le privé, pour atteindre l'objectif de 500 000 nouveaux logements chaque année, dont 150 000 dans le secteur social. Une autre source de financement est envisagée pour alimenter le robinet à finances du Plai plus, celui du fonds national recueillant les pénalités acquittées par les communes ne respectant pas la loi SRU (imposant désormais 25% de logements sociaux aux communes. L'Union sociale pour l'habitat) propose d'expérimenter, avec un tel outil de financement, le dispositif des «logements sociaux accompagnés» construits pour les personnes en grande précarité. Marie-Noëlle Lienemann estime que «pour bon nombre de gens, il ne suffit pas de trouver un logement, il faut assurer un suivi social, un cadre de vie permettant une insertion». Ce public multiforme englobe les personnes relevant du DALO (droit au logement opposable), en situation d'errance, en délicatesse psychologique, sortant de centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) ou d'hôpital psychiatrique. Le mouvement HLM est prêt à créer cette «filière d'habitat accompagné et adapté», comprenant en son sein des personnes spécialisées dans le suivi social, en lien avec des associations locales, action qui doit s'inscrire dans la durée pour être efficace.
Dix mille maisons-relais ou hôtels familiaux pourraient ainsi voir le jour dans les prochaines années. Cécile Duflot a assuré que l'idée était «intéressante».
«Tout le monde est d'accord sur le principe d'un super-Plai», assure Bernard Oliver, président de l'association régionale des organismes HLM en PACA. «Reste à en savoir plus sur le financement. Le relèvement du plafond du livret A donne aujourd'hui une meilleure visibilité aux bailleurs sociaux mais ils ne pourront pas agir sans une intervention significative de l'État».
Tout au long du congrès de l'USH, les bailleurs n'ont eu de cesse de rappeler qu'ils avaient de plus en plus de mal à boucler leurs plans de financement. Mis en cause, les coûts de construction qui ont pratiquement doublé en un an, passant, selon l'USH, en moyenne de 80 000 euros en 2000 à 140 000 euros en 2010, mais aussi le foncier, dont le prix peut constituer jusqu'à 25% du coût de l'opération, sans oublier la multiplication des normes réglementaires. Dans le même temps, les aides à la pierre versées par l'État épousent une courbe descendante : 450 millions d'euros versés en 2012, soit une baisse de 13,2 % par rapport à 2011. En l'état actuel, ces aides ne représentent que 2% du total financier d'un projet de construction. Pour l'avenir, «tout ne sera pas possible», a assuré la ministre aux congressistes de Rennes. L'USH espérait un doublement progressif des aides à la pierre. Elle sera, en 2013, plutôt symbolique (500 M d'euros) au regard des attentes. Cette stagnation est en contradiction avec la hausse des objectifs de production fixés par l'État aux bailleurs, contraints de recourir de plus en plus à leurs fonds propres. En 2010, 12% des fonds propres avaient été mobilisés pour financer des projets de construction ; en 2000, ce taux d'effort n'excédait pas 5%.
Les collectivités et les bailleurs attendent donc plus de l'État. «Bien sûr, nous soutenons la démarche», assure Monique Vuaillat, adjointe au logement et à l'habitat à la mairie de Grenoble. «Nous l'avons déjà mise en œuvre d'une certaine façon à Grenoble en versant une subvention pour minorer les loyers Plai, qui tournent autour de 4,85 euros le mètre carré. Mais nous n'irons pas jusqu'à 4 euros. La situation est claire, 60% des demandeurs de logements sociaux sont dans une situation délicate, l'idée d'un Plai plus se justifie donc pleinement. Mais si l'État ne prévoit pas le financement adapté, cette annonce sera sans effet. Les bailleurs et les collectivités ont fait beaucoup d'efforts pour pallier le retrait de l'État. Il est donc urgent de trouver de nouveaux modes de financement», assure-t-elle.
Ancien député Ump, très impliqué sur le dossier logement, Étienne Pinte est toujours président du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (Cnle). «J'ai eu récemment un petit échange avec Cécile Duflot. J'ai salué sa volonté de créer 150 000 logements sociaux mais je lui ai demandé de préciser quel type de logement social elle entendait soutenir. Ce serait bien que 50% des 150 000 logements annoncés soient des Plai. Et, dans ce dernier ensemble, que 50% soient des Plai plus. Je reste pour l'heure dans l'attente de plus amples précisions sur le mode de financement de ces nouveaux prêts», précise-t-il. Une réponse qui ne devrait pas tarder à survenir pour ne pas briser «le pacte de confiance» établi à Rennes entre le mouvement HLM et l'État.
Pour financer le logement social, il existe plusieurs types de prêts. Le prêt locatif aidé d'intégration (Plai) est prévu pour les ménages qui rencontrent des difficultés d'insertion. Les bénéficiaires ne doivent pas gagner plus de 12 285 euros par an (+ 4286 euros avec une personne supplémentaire) s'ils habitent en région Ile-de-France. Le montant baisse à 10 678euros (+ 3061euros avec une personne supplémentaire) en région. Trois autres prêts complètent le dispositif de financement des logements sociaux : le prêt locatif à usage social (Plus) est le principal dispositif de financement du logement social ; le prêt locatif social (PLS) finance des logements destinés aux ménages dont les ressources ne dépassent pas 1,3 fois les plafonds du Plus. Enfin, le prêt locatif intermédiaire (PLI) a été conçu pour financer des logements destinés aux ménages dont les ressources sont trop élevées pour bénéficier d'un logement HLM, mais trop faibles pour le marché privé. Chaque année, au 1er janvier, les plafonds sont révisés en prenant en compte la variation de l'indice de référence des loyers (Irl).
Alire
Pourquoi le gouvernement veut 25% de logements sociaux ? La Lettre du cadre n°446, 1er juillet 2012