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Article du numéro 420 - 15 avril 2011
Anne-Marie Ducroux est administratrice de Transparence International France (section française de Transparency International (TI), organisation qui se consacre à la lutte contre la corruption). Ancienne présidente du Conseil national du développement durable, elle est membre du Conseil économique, social et environnemental. Tous les articles du numéro 420 |
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Le lobbying fait l'objet de controverses régulières et souvent de positions très tranchées. À ce jour, les sciences politiques se sont encore peu penchées sur cette question et trop peu de données existent. Le lobbying est un sujet difficile à suivre par les diverses formes qu'il prend : discussions informelles, mails, invitations, auditions, suggestions d'amendement... L'obtention de données objectives est essentielle pour limiter les idées préconçues, mais surtout faire avancer le débat sur la pratique du lobbying en France.
Les sujets en débat public sont souvent complexes, parfois techniques, et peuvent nécessiter de confronter une pluralité de points de vue avec des connaissances expertes et contradictoires. La transmission d'informations à des parlementaires qui ne peuvent pas connaître tous les sujets sur lesquels ils sont souvent amenés à statuer dans l'urgence peut servir la pertinence de la décision publique.
Il est cependant essentiel de rendre l'usage du lobbying plus transparent afin de permettre aux citoyens de savoir comment leurs représentants prennent les décisions en leur nom. Il s'agit aussi de s'assurer que les différents intérêts - économiques, sociétaux, environnementaux, culturels - bénéficient d'un accès équitable auprès des parlementaires. Enfin, il faut prévenir de possibles dérives. Aussi, les mesures d'encadrement du lobbying ne peuvent continuer à ne viser que les lobbyistes, mais doivent aussi concerner les élus et leurs collaborateurs, c'est-à-dire tout décideur agissant pour le compte de la Nation ou engageant les financements publics par ses décisions.
Il faudrait déjà un dispositif commun aux deux assemblées - ce n'est pas le cas aujourd'hui - avec une instance qui pourrait être sollicitée par tout parlementaire, citoyen ou acteur souhaitant être informé ou signaler des pratiques contraires au Code de conduite ou au règlement des assemblées. Il faut également améliorer l'empreinte législative, collective et individuelle, permettant aux citoyens de connaître les conditions d'élaboration des décisions. Les positions communiquées aux parlementaires devraient être rendues publiques et des règles de prévention des conflits d'intérêts devraient être instaurées.
Certainement. La ville de Toronto s'est par exemple dotée d'un registre des lobbyistes et de deux Codes de déontologie, l'un pour les lobbyistes et l'autre pour les membres du conseil municipal. Par ailleurs, en matière de prévention des conflits d'intérêts, les élus locaux doivent être soumis aux mêmes obligations que celles proposées par la Commission Sauvé : remplir une déclaration d'intérêts annuelle, rendue publique au moins pour les élus des grandes collectivités locales, déclarer les risques de situation de conflits d'intérêts et s'abstenir le cas échéant. Lorsque nous avons questionné les candidats aux régionales, beaucoup se sont déclarés prêts à adopter de telles mesures d'encadrement du lobbying et de prévention des conflits d'intérêts, comprenant l'intérêt de restaurer la confiance des citoyens (2).
1. L'étude : www.transparence-france.org/ewb_pages/div/Encadrement_du_lobbying.php
2. www.transparence-france.org/ewb_pages/div/Elections_régionales_2010.php
À lire
Interview de Daniel Lebègue « La France pays corrompu ? », La Lettre du cadre territorial n° 381, 1er juin 2009.