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Pas de contrôle d'identité pour la police municipale

Article du numéro 417 - 01 mars 2011

La lettre numérique

Saisi par plusieurs dizaines de députés et sénateurs, le Conseil constitutionnel a statué sur la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (dite LOPPSI). Il a censuré treize dispositions, dont l'article 92 qui étendait aux agents de police municipale la possibilité de procéder à des contrôles d'identité, et l'article 91 qui accordait la qualification d'agent de police judiciaire aux directeurs de police municipale.

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Le Conseil constitutionnel a donné raison aux requérants qui soutenaient que l'extension à l'ensemble des agents de police judiciaire adjoints de la possibilité de procéder à des contrôles d'identité n'offrait pas de garanties suffisantes contre des atteintes arbitraires à la liberté individuelle.

L'article 66 de la Constitution stipule que la police judiciaire doit être placée sous la direction et le contrôle de l'autorité judiciaire, en particulier pour les crimes et délits qui sont punis de peines privatives de liberté. L'exigence de direction et de contrôle de l'autorité judiciaire sur la police judiciaire ne serait pas respectée si des pouvoirs généraux d'enquête criminelle ou délictuelle étaient confiés à des agents qui ne sont pas mis à la disposition des officiers de police judiciaire.

La « chaîne de contrôle » serait par trop distendue entre le procureur de la République et l'agent chargé de l'enquête, si ce dernier n'était pas sous l'autorité directe et immédiate des officiers de police judiciaire.


Autorité en question

Or, la disposition contestée avait pour objet de confier à des agents de police municipale la mission d'opérer des contrôles d'identité dans le cadre de l'article 78-2 du CPP à des fins de police judiciaire, et non pas seulement de police administrative, alors que ces agents relèvent de l'autorité du maire en tant qu'exécutif de la commune, et ne sont pas à la disposition des autorités de l'État.

Certes, dans ses observations, le Premier ministre avait tenté de démontrer l'existence d'un lien direct entre le procureur de la République et les agents de police judiciaire adjoints en indiquant que les contrôles se dérouleraient en la présence effective d'un OPJ et en apportant deux précisions.

Premièrement, l'article 92 ne saurait être lu comme autorisant la substitution des agents de police judiciaire adjoints aux OPJ. En second lieu, dans le cadre de la mise en oeuvre de cette disposition, l'officier de police judiciaire assurant la direction des opérations ne saurait être le maire de la commune.


Méconnaissance de la Constitution

Mais, le Conseil constitutionnel n'a pas repris à son compte ces indications complétant la loi et a jugé qu'en confiant à des agents de police municipale, qui relèvent des autorités communales et ne sont pas mis de façon effective à la disposition des officiers de police judiciaire, le pouvoir d'opérer des contrôles d'identité dans le cadre de l'article 78-2 du CPP à des fins de police judiciaire, l'article 92 méconnaissait l'article 66 de la Constitution.

Le Conseil constitutionnel a en outre examiné d'office, pour les censurer, d'autres dispositions en particulier l'article 91 de la LOPPSI, qui étendait la qualité d'agent de police judiciaire aux directeurs de police municipale. Cependant ceux-ci n'étant toutefois pas, dans le même temps, mis à la disposition des officiers de police judiciaire, le Conseil constitutionnel a jugé l'article 91 contraire à la Constitution. Il a retenu les mêmes arguments que ceux qui avaient conduit à la censure de l'article 92 pour le contrôle d'identité.


D'autres mesures pour la police territoriale

En ce qui concerne la police territoriale, le Conseil constitutionnel a également censuré les dispositions suivantes :

- la possibilité de déléguer à des personnes privées l'exploitation et le visionnage de la vidéoprotection. Le Conseil constitutionnel a jugé que ces dispositions permettaient de confier à des personnes privées la surveillance générale de la voie publique et ainsi de leur déléguer des compétences de police administrative générale inhérentes à l'exercice de la « force publique ». (article 18)

- le fait pour le représentant légal du mineur de ne pas s'être assuré du respect par ce dernier du «couvre feu» collectif ou individuel instauré par le préfet était sanctionné d'une peine contraventionnelle. Cette disposition a été censurée car elle permettait de punir le représentant légal pour une infraction commise par le mineur. (article 43)

- la possibilité au préfet de procéder à l'évacuation forcée de terrains occupés illégalement par d'autres personnes (article 90). Ces dispositions permettaient de procéder dans l'urgence, à toute époque de l'année, à l'évacuation, sans considération de la situation personnelle ou familiale, de personnes défavorisées et ne disposant pas d'un logement décent, ce qui opérait une conciliation manifestement déséquilibrée entre la nécessité de sauvegarder l'ordre public et les autres droits et libertés.


Pour aller plus loin

- Télécharger le commentaire aux Cahiers de la Décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011 - Loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI)

- Télécharger le Pdf de la lecture de la décision

(sources de l'article)