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Cap sur le nouveau potentiel fiscal !

Article du numéro 417 - 01 mars 2011

Fiscalité

Les EPCI ont bien failli devoir affronter une réforme de plus. La rédaction initiale de la loi de finances prévoyait en effet, dès 2011, la refonte du potentiel fiscal. L'objectif : tirer les conséquences de la suppression de la TP et des recompositions de fiscalité locale et mieux apprécier la richesse fiscale des EPCI à fiscalité propre. Heureusement, les parlementaires ont veillé au grain et repoussé la mesure à 2012. Reste à s'y préparer !

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L'année 2012 marquera un tournant important pour le potentiel fiscal. Cet outil, inchangé depuis 1979, qui vise à mesurer la richesse fiscale d'une collectivité, a vécu jusqu'ici un long fleuve... presque tranquille.


Une vieille notion, un peu ajustée...

Cette longévité était due à la simplicité du critère, mais surtout à l'objectivité de son calcul, qui reposait sur la formule suivante : valeur des bases brutes des quatre impôts directs locaux multipliée par le taux moyen national d'imposition de chacun de ces impôts. L'intérêt de ce mode de calcul était alors de neutraliser l'effet des taux votés. Il permettait ainsi d'apprécier de manière pertinente le niveau de richesse des collectivités, avec, pour les plus riches, un potentiel fiscal élevé malgré des taux bas et, pour les plus pauvres, un potentiel fiscal bas malgré des taux élevés.

Bien entendu, au fil des réformes, certaines adaptations ont été apportées.

Ainsi a-t-on considéré que la notion de potentiel fiscal ne traduisait que partiellement les écarts de richesse entre les collectivités, du fait de la décentralisation d'impôts nouveaux et de l'accroissement considérable des dotations de l'État. On a tenté de corriger ces insuffisances, notamment par l'incorporation dans le potentiel fiscal de composantes liées aux compensations fiscales perçues par les collectivités, comme la compensation de l'ancienne part salaires de la TP. On a aussi tenté de le faire par l'avènement d'une nouvelle mesure de la richesse locale : le potentiel financier, qui additionne au potentiel fiscal les dotations forfaitaires de l'État et les autres ressources fiscales (ainsi pour les communes, le potentiel financier est égal à la somme du potentiel fiscal et du montant de la dotation forfaitaire de l'année précédente).


Un nouveau potentiel fiscal

Reste que jamais une réforme d'envergure n'avait jusqu'ici été initiée. Jamais... jusqu'à la loi de finances pour 2011. En effet, la suppression de la TP et la mise en place pour 2010 d'un régime transitoire avec la compensation relais ont rendu largement obsolètes les dispositions relatives aux modalités de calcul des potentiels fiscaux et financiers.

La loi de finances pour 2011 en a tiré les conséquences en affichant en son article 183 le principe suivant : « à compter de 2012, le potentiel fiscal [...] est déterminé par application aux bases [...] des impositions directes locales du taux moyen national d'imposition de chacune de ces impositions. Les impositions prises en compte sont celles mentionnées au I de l'article 1379 du Code général des impôts, à l'exception des impositions prévues aux 6°, 7° et 8° de cet article » (soit, la redevance des mines, l'imposition forfaitaire sur les pylônes, et la taxe annuelle sur les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent et situées dans les eaux intérieures ou la mer territoriale). En d'autres termes, dès 2012, le potentiel fiscal des collectivités calquera son calcul sur le nouveau panier fiscal compensant la suppression de la TP. Le potentiel fiscal ainsi calculé sera majoré des montants de dotation et fonds de compensation de la réforme TP (DCRTP et FNGIR prévus aux 1.1 et 2.1 de l'article 78 de la loi de finances pour 2010) ainsi que de la compensation de la part salaires (article 44 de la loi de finances pour 1999).

La logique suivie pour le calcul du potentiel fiscal restera quant à elle la même. Ainsi, comme avant, les bases retenues seront les bases brutes de la dernière année dont les résultats sont connus servant à l'assiette des impositions intercommunales (ou communales pour le calcul du PF d'une commune).


2011, année d'exception

Reste que l'année 2011, année transitoire, fera exception. En effet, la loi de finances pour 2011 prévoit que pour le calcul du PF 2011, les bases et taux moyens de TP à prendre en compte sont ceux utilisés pour le calcul du potentiel fiscal en 2010, soit les bases et taux moyens de TP de 2009, alors que dans le même temps, s'agissant de la fiscalité ménages, seront pris en considération les bases et les taux moyens nationaux de l'année 2010. Et la raison de cette différence de méthodes pour la seule année 2011, est simple : écarter l'effet de la compensation relais. En effet, cette compensation, qui compense la perte des produits de TP en 2010, est un produit réel faisant intervenir les recettes effectivement perçues au titre de la TP, soit les bases réelles multipliées par le taux appliqué au niveau local. Or, le calcul du potentiel fiscal repose, lui, sur des données théoriques issues des bases réelles multipliées par des taux moyens nationaux, l'objectif étant de mesurer le montant que percevrait la collectivité si elle appliquait les taux moyens nationaux aux bases d'imposition locales.

En d'autres termes, seules les inégalités objectives de situation, et non celles liées à des différences de gestion (vote des taux), doivent être prises en compte dans le calcul du PF, ce qui ne serait pas le cas si le calcul faisait intervenir la compensation relais. D'où le choix du législateur d'écarter du calcul du PF 2011 la compensation relais.


Un potentiel fiscal agrégé « communes/EPCI »

Mais cette mesure conservatoire adoptée pour la seule année 2011, ainsi que le calage du PF 2012 sur le nouveau panier fiscal perçu par les collectivités ne sont pas les deux seuls pans de la réforme voulue par le Gouvernement.

En effet, ce dernier a inscrit également dans le texte de la loi de finances pour 2011 (art. 183 LFI 2011), le calcul d'un potentiel fiscal agrégé « communes/EPCI » pour les EPCI à fiscalité propre : « à compter de 2012, le potentiel fiscal de chaque EPCI est calculé par adjonction au potentiel fiscal, [...] des potentiels fiscaux de chacune de leurs communes membres appartenant à l'établissement au 31 décembre de l'année précédente [...] ».

La logique change du tout au tout. Ainsi un EPCI anciennement à TPU, présentant un potentiel fiscal TP faible par rapport aux autres membres de sa catégorie du fait d'un tissu économique peu doté, pourrait-il dès le 1er janvier 2012 paraître mieux doté fiscalement qu'il ne l'était au 31 décembre 2011, par la simple prise en compte dans le calcul de son PF (désormais agrégé à compter de 2012) de la fiscalité ménages levée par ses communes membres. Évidemment, ce changement de cap ne serait pas sans incidence sur la DGF, dont le niveau est inversement proportionnel à la richesse fiscale d'un territoire.

Cette mesure prévue dès 2011 et finalement repoussée à 2012 par les parlementaires, pourrait générer des transferts de DGF non négligeables d'un territoire intercommunal à l'autre, alors même que la richesse réelle de l'EPCI n'aura pas varié.

Reste que la réforme est actée dans la loi de finances 2011 et qu'une fois de plus il semble bien que le principe ait été posé avant même que les conséquences en aient été mesurées...


Laisser du temps au temps

Les parlementaires (comme sur la péréquation) ne sont pas dupes ! On en veut pour preuve l'avis tranché du rapporteur spécial de la commission finances du Sénat qui avait fait part au moment de la discussion du texte, de la plus vive réserve sur la question, constatant « qu'il n'existe pas de simulations détaillées autres que celles qui ont pu être réalisées dans le cadre des travaux de la mission Durieux », avant d'ajouter qu'« en outre, le projet de loi de finances comporte plusieurs propositions d'ajustement de la fiscalité économique locale qui ne manqueront pas d'avoir des effets importants sur le potentiel fiscal des collectivités territoriales » et que « dans ces conditions de grande incertitude, il apparaît donc plus raisonnable de laisser du temps à la réflexion et à la concertation » et donc « de reporter à plus tard la définition du potentiel fiscal 2012 ».


DocDoc

À lire
« Avancer ses pions sur le grand échiquier fiscal », La Lettre du cadre territorial n° 415, 1er février 2011
Pour se former
EPCI et réforme territoriale : quelles conséquences ?
Paris : 9 mars 2011 ou Lyon : 14 mars 2011
Contact : soumiya.el-amiri@territorial.fr, 04 76 65 99 81