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Article du numéro 372 - 14 janvier 2009
Jacqueline Domenach est professeur de droit public, directrice de l'UFR Droit et Sciencespolitiques, Paris Ouest-Nanterre-La Défense, associée à mairie-Conseil (Caisse des dépôts et consignations). Tous les articles du numéro 372 |
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Jacqueline Domenach est professeur de droit public, directrice de l'UFR Droit et Sciences politiques, Paris Ouest-Nanterre-La Défense, associée à Mairie-Conseil (Caisse des dépôts et consignations).
Différents rapports publiés ces dernières années s'accordent sur la nécessité d'une réforme. S'il y a consensus sur ce point, j'observe qu'il y a également convergence pour s'épargner une réflexion théorique sur les enjeux et les objectifs de cette réforme. On peut faire le constat qu'il y a trop d'échelons, qu'il faut clarifier les compétences... mais avant de poser des hypothèses et d'étudier des solutions, ne faudrait-il pas d'abord se demander comment on en est arrivé là ? Face à des enjeux complexes et des réactions corporatistes - même légitimes car émanant d'élus - on s'expose à demeurer dans l'illusoire en ne prenant pas le temps d'identifier les raisons d'une telle convergence.
La situation actuelle résulte d'une sédimentation de réformes marquées par une faiblesse de la réflexion sur la dimension spatiale et géographique des territoires d'une part, d'un manque d'analyse de la répartition des compétences entre l'État et les territoires, d'autre part. On affirme que l'État est le garant de l'égalité et de l'unité, mais on assiste à son désengagement et on plaide pour des politiques structurantes menées à l'échelon local. On affirme le principe de « libre administration », mais tandis que l'on transfère des compétences, on ne reconnaît pas vraiment le cadre local... Toute velléité de réforme devrait d'abord s'attacher à lever ces ambiguïtés : que signifie transférer des compétences à des échelons locaux ? Quel pouvoir local veut-on en France ? La libre administration seulement ou autre chose ? Pour ne pas heurter les principes républicains de liberté et d'égalité, on élude ces questions et on s'expose au piège des effets d'annonce ou de la réforme par décret, débouchant sur la suppression d'un échelon ou des regroupements autoritaires.
On ne peut à la fois vouloir plus de démocratie et plus de pouvoirs, et rester au niveau de la « libre administration ». Il faut lever cette ambiguïté et l'État doit se positionner sur le niveau d'autonomie politique des territoires. On pourra alors penser la question de la recomposition des territoires en fonction des enjeux de compétitivité, d'attractivité, d'efficacité de l'action publique, de lisibilité de la démocratie. L'enjeu du rapport entre l'urbain, le périurbain et le rural est majeur. Il pose le débat entre la pertinence des territoires et l'action que l'on conduit, le niveau où elle est décidée. La méthode devrait privilégier l'expérimentation de fusions, de fédérations de territoires pertinents.
La notion de clause générale de compétences, définie en fonction d'un intérêt local, me paraît inadaptée et sans grand sens. À mon avis, les discussions sur cette clause masquent en réalité celles sur la répartition des compétences. Là encore, on est face à une contradiction : on ne peut à la fois invoquer un État égalitaire et unitaire, être soucieux de refuser l'émergence des identités territoriales, et en même temps développer une pensée sur l'intérêt local. En réalité, on ne veut pas supprimer cette clause parce qu'on ne va pas jusqu'au bout de la logique de spécialisation des niveaux d'intervention par rapport à un État garant de l'idée républicaine d'égalité et d'unité. La clause générale de compétence est « politiquement correcte »