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Edito

Culture : les programmes culturels du Front de Gauche et des écologistes pour les Présidentielles. (14/04/2012)

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Après avoir rendu compte des propositions du Parti socialiste (cf. notamment mon édito du 23 janvier et les rubriques Présidentielles des numéros suivants), penchons-nous aujourd'hui sur les programmes des deux autres principaux partis de la gauche française en matière de politique culturelle.

FRONT DE GAUCHE : QUELLE HUMANITE VOULONS-NOUS ETRE ,
Le Front de Gauche souhaite faire de la culture (qui est un droit fondamental)  un moteur de la transformation sociale, en ne proposant pas seulement une révision des moyens affectés à la culture mais une remise à plat du contenu et des contours de la politique culturelle, dans le respect de certaines exigences : mobiliser l'ensemble des citoyens, garantir la liberté d'expression et de création en vue d'un « partage du sensible », dans la reconnaissance de la diversité de l'autre.
La création - Il convient d'arriver à conjuguer démocratisation (du patrimoine artistique remarquable) et démocratie culturelle (permettre à chacun de se construire un parcours sensible qui lui ressemble, jalonné de repères communs... y compris dans le temps du travail). Il convient de coordonner les réponses qui permettront  de soutenir les artistes (ce sont des chercheurs permanents, qui doivent être dégagés de la précarité et des soucis de gestion)  tout en permettant à tous (par une politique d'éducation populaire se concrétisant en 5 propositions et une politique d'éducation artistique en 3 propositions)  de lire et produire des signes, de « partager des métaphores ».


Une économie au service de la culture -Le Front de Gauche propose d'augmenter de façon conjointe les moyens de l'Etat et des collectivités (+ 10% par an) , d'encourager les politiques de permanence artistique des établissements culturels  (recréer des emplois permanents), de mieux réguler les industries culturelles  et enfin de doter l'audiovisuel public d'un pôle public de production. Il préconise des Etats généraux du cinéma et fait 13 propositions en la matière. Il souhaite une redéfinition des missions du CNM au service de toutes les musiques, de tous les musiciens et de tous les citoyens, car la musique ne saurait être réduite à une filière industrielle. En faveur du livre Il propose là aussi des Etats généraux et 8 mesures pour refonder une politique volontariste. Il entend enfin prendre davantage en compte les questions d'architecture et de cadre de vie.
Le travail et l'emploi - Le Front de gauche entend combattre la précarité  et créer les conditions de la création d'emplois permanents. Au travers des 5 propositions qu'il fait en la matière, signalons « la reconnaissance explicite des fonctions culturelles dans la fonction publique territoriale ». Il propose 7 mesures spécifiques aux intermittents et 6 autres  en faveur des plasticiens.
Culture et numérique - Le Front de gauche propose des plates-formes publiques de téléchargement  dotées de trois types de ressources : redevance analogue à la redevance audiovisuelle, taxe sur les fournisseurs d'accès et les recettes publicitaires, réaffectation des taxes sur les ordinateurs, téléphones etc.
Une appropriation populaire des médias - Le Front de gauche compte refonder le service public, proposer de nouveaux dispositifs anti concentration, créer en lieu et place du CSA un Conseil national des médias  qui pourrait être interpellé par les Etats généraux des médias.
Exception et diversité culturelle -  Le Front de Gauche  agira pour une mise en œuvre effective de la convention de l'Unesco de 2005. Il refondera l'action culturelle extérieure de la France (réflexion sur l'éventuelle création d'un corps de conseillers culturels dûment formés). Il dotera l'Union européenne d'une véritable politique culturelle, en sortant les services culturels de la directive « Services ».
Pour une refondation du service public de la culture - Le Front de gauche se prononce pour une loi d'orientation et de programmation pour les arts, la culture et les medias. Le ministère de la culture devra conduire et coordonner au plan interministériel  les politiques culturelles dont il est à même d'assurer la cohérence. Reconnaissant la place prépondérante des collectivités dans le financement des politiques culturelles, des schémas territoriaux de développement artistique et culturel seront  élaborés de façon concertée sur l'ensemble du territoire. Votés et financés par les collectivités (Région, Départements et communes), ces schémas  auront pour objet de coordonner les actions et de mutualiser les moyens. L'acte artistique doit pouvoir bénéficier d'un cadre de référence déontologique, selon trois principes : l'égalité des droits des artistes à être éligibles aux dispositifs de soutien et d'accompagnement ; l'invitation aux acteurs à travailler avec les habitants dans le cadre de projets de territoire ; enfin l'engagement d'un soutien public dans la durée. Le contrat de permanence artistique, qui englobera les dispositifs existants (pilotage Drac et collectivités)  reposera sur le double engagement des pouvoirs publics  à nouer une relation durable avec une équipe artistique sur un territoire, et de celle-ci  à s'installer sur ce territoire pour y écrire une aventure artistique pour et avec les habitants. Les projets artistiques sélectionnés sont accueillis par les établissements publics du réseau du territoire, dont les moyens humains et financiers seront mutualisés au service du projet.

LES ECOLOGISTES : LA CULTURE, UN BIEN COMMUN POUR UNE DEMOCRATIE VIVANTE
La culture est un élément consubstantiel du projet écologiste. C'est aussi la condition sine qua non pour reconquérir la confiance des citoyens et « faire société, alors que la mondialisation culturelle attise les crispations identitaires et encourage la consommation effrénée de biens culturels standardisés.

L'État et les collectivités doivent agir en cohérence, avec une attention particulière à la diversité, aux petits projets, aux lieux et pratiques en émergence sur les territoires.

- Des États généraux des droits culturels (1) seront organisés dans chaque région pour élaborer avec tous les acteurs les politiques culturelles. Ce sera occasion d'une mise en débat pour une réforme de l'emploi artistique et culturel prenant notamment en compte les temps de travail indirectement productifs.

(1) les droits culturels, c'est-à-dire le droit pour chacun de mettre en valeur ses éléments culturels comme bon lui semble, dans une démarche non pas participative mais contributive à ce qui fait humanité. Dès sa naissance, le plus humble des êtres humains est une source de culture, c'est aussi ce qui fonde sa dignité.

-Une rénovation de la gouvernance du Ministère de la culture et des institutions culturelles : pour une culture plus démocratique, affranchie à la fois de la domination de l'industrie culturelle (opposition à la création du CNM) et de celle d'un pouvoir politique trop centralisé. Démocratie, transparence: pour une charte éthique et démocratique pour la culture, afin de permettre une meilleure représentativité de la diversité des cultures, qu'elles soient savantes ou populaires, émergentes ou patrimoniales (elle inclura aussi une meilleure représentativité des femmes dans le milieu culturel). Mettre en débat  dans cet esprit un Agenda 21 de la culture.

- Une culture accessible à tous : adoption d'une nouvelle fiscalité de l'art et de la culture, qui favorise la circulation des biens culturels « art et essai », en commençant par appliquer le taux super-réduit de TVA aux œuvres écrites, littéraires, artistiques et philosophiques, et le préserver pour la billetterie de spectacles.

- L'éducation artistique et l'éducation populaire doivent redevenir un pilier essentiel des politiques publiques sur l'ensemble du territoire, via des conférences territoriales avec l'ensemble des collectivités et des associations afin de définir et coordonner l'enseignement artistique dans le circuit scolaire comme extrascolaire, et tout au long de la vie.

- Internet : pour l'abrogation de la loi Hadopi et la légalisation du partage non marchand, par une contribution d'un milliard d'euros pour le soutien aux auteurs, à laquelle participeront les fournisseurs d'accès et les internautes « à hauteur de leurs moyens ».

- Pour une réforme du CSA et du mode de nomination des dirigeants de l'audiovisuel public , l'objectif étant de garantir le pluralisme des médias et la parité des instances.

D'autres propositions complémentaires, portant notamment sur le patrimoine, le cinéma, le livre et les musiques, figurent dans un texte d'Eva Joly adressé à la FNCC.

François Deschamps

Photos : E. Joly : Matthieu Riegler, CC-BY ; JL Mélenchon : ©Place_au_Peuple

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Extrait de Lettre d'information du réseau culture - N° 344 (14/04/2012)
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