consultation guide des usages, du protocole et des relations publiques

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VIII • Les jumelages et relations internationales

Fiche pratique n° 2  Le voyage d’étude ou l’art d’associer réflexion et partage d’expériences

 

Un système réglementaire de plus en plus complexe, un contexte économique tendu, des changements radicaux et rapides en termes d’habitude de consommation, de vie… conduisent tout entrepreneur, tout élu, tout responsable à (re) penser ses choix, ses décisions stratégiques dans un environnement mouvant.

 

Face à la multitude d’éléments aujourd’hui à prendre en compte pour arrêter un choix, le décideur ne peut plus rester isolé, il doit partager, échanger, apprendre, prendre conseils, étudier d’autres cas… Cette nécessité de relations avec d’autres génère depuis une dizaine d’années l’explosion de groupes et lieux d’échanges. En parallèle des traditionnels DCF, CJD…, mouvements anciens mais qui connaissent ces dernières années un regain d’intérêt, il n’existe aucun secteur d’activité qui ne fasse pas l’objet d’un blog, d’un réseau Facebook, d’un site participatif. Toutes les fédérations, syndicats et autres unions professionnelles ont mis en place des espaces d’échanges sur le Web. Conseils, trucs et astuces, plateformes partagées, FAQ doivent permettent aux adhérents de trouver des réponses à leurs problèmes.

 

Ces mêmes organisations ont compris aussi l’importance de la veille stratégique : les fameux benchmark sectoriel et benchmark concurrentiel. Mais au-delà de la simple observation de ce que font les autres et de la « pêche aux bonnes idées », une déclinaison de ce principe se fait de plus en plus présente : le voyage d’études professionnel. Le principe simple du déplacement à l’extérieur pour une observation, une confrontation, un échange, une remise en question et une réflexion sur sa propre situation repose sur trois objectifs généraux :

- réfléchir à sa propre réalité, en étant confronté à un univers différent ;

- transmettre ses connaissances, échanger et entretenir la réflexion après le voyage ;

- participer à l’enrichissement des réflexions sur le thème du voyage.

 

A - Repérer une problématique de filière

 

En 2010, Interloire, l’interprofession des vins de Loire, mène une réflexion sur la diversification des activités dans les domaines viticoles, notamment sur l’intérêt des prestations touristiques complémentaires à l’exploitation agricole.

Rappelons que l’objectif premier de cette organisation, née de la volonté des vignerons et des négociants du Nantais, de l’Anjou, du Saumurois et de la Touraine de défendre et développer leurs appellations, est la valorisation durable du troisième vignoble français. L’ensemble représente cinquante et une appellations, de Nantes à Blois, de toutes couleurs – blanc, rouge, rosé – en vins tranquilles ou de fines bulles, sur les quatre-vingt-six appellations composant la mosaïque des vins de Loire de Nantes à Sancerre.

C’est donc dans une vision à long terme que ce syndicat interprofessionnel projette ses actions de défense de ses membres et se veut source de propositions dans le développement des entreprises de la filière. De nombreuses actions directement liées au cœur du métier (incitation à la diminution des rendements à l’hectare, actions commerciales à l’export, amélioration des techniques de vinification…) sont mises en place depuis plusieurs années pour aider un secteur touché par une crise sans précédent. La réflexion d’Interloire a été de chercher également au-delà du cœur du métier d’autres sources de revenus pour ses membres et notamment le développement des activités touristiques. L’apport de visiteurs représente plusieurs avantages : la vente directe (pas d’intermédiaire à rémunérer, mise en place d’une véritable GRC) et des ressources liées à la vente de services (table d’hôtes, gîtes..).

 

En 2010, il a donc été proposé aux viticulteurs intéressés par cette diversification (du simple projet à une expérience déjà établie mais encore complète) de participer à un voyage d’étude.

 

B - Qui a pris de l'avance dans ce domaine ?

 

La vallée du Douro au Portugal s’est alors imposée en tant que destination pour un voyage d’études sur l’œnotourisme, pour plusieurs raisons, notamment la présence d’un fleuve en tant qu’élément identitaire, situation similaire en Val de Loire. Ajoutons à cela que la vallée est aussi inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco, et que l’on peut considérer que les deux vallées connaissent une renommée analogue au niveau international. La région de la vallée du Douro est le haut lieu de la production de Porto et du vin du Douro et depuis quelques années, les acteurs viticoles de la vallée ont compris l’intérêt de l’œnotourisme pour développer leur vente et la notoriété de leur vin. Le gouvernement portugais considère le Douro comme priorité de développement touristique, ainsi que l’IDVP, l’institut des vins de Porto.

Outre la qualité paysagère et la dimension patrimoniale (reconnu par l’Unesco puisqu’inscrit au patrimoine mondial), la région se distingue également par la qualité de prestations offertes par certaines Quintas (grands domaines viticoles) qui considèrent les activités œnotouristiques comme faisant partie naturellement du « métier » de vigneron et du projet d’entreprise de l’exploitation.

 

C’est donc là le deuxième point important de ce dossier : après avoir cerné la problématique de la filière (nécessité de diversification des activités), il est central de repérer une destination qui a connu ou connaît encore cette même problématique et qui a déjà engagé des actions d’amélioration. Cette phase est au cœur du succès du voyage mais elle intimement liée à une troisième étape qui est de s’assurer de la volonté des interlocuteurs locaux de partager l’expérience avec d’autres, démarche pas forcément naturelle.

 

C - Analyse fine du contexte étudié

 

Il a donc fallu comprendre l’articulation des organismes impliqués dans la filière du vin. Comprendre les niveaux d’intervention entre les services de l’État et ceux de la région, comprendre qui assure les rôles de réglementation (équivalent de notre INAO) et qui assure les rôles de conseils et de promotion, comprendre les conflits d’intérêts entre producteurs et négociants, entre autochtones et investisseurs étrangers (historiquement Hollandais et Anglais ont toujours été très présents localement). Cette étape est longue, laborieuse, compliquée par la nature du sujet et par la barrière de la langue. Mais lorsqu’elle est réalisée il est alors aisé de prendre contact avec les interlocuteurs les plus pertinents.

 

Cette étude du contexte historique et économique a permis de comprendre pourquoi la vallée du Douro et des vins de Porto ont cette longueur d’avance en œnotourisme en Europe : une des décisions les plus radicales du mouvement de libéralisation suite à l’adhésion à l’UE, quoique peu connue, annule un interdit vieux de plusieurs siècles et autorise la commercialisation du vin de Porto sur les lieux de production. Dès lors, des caves d’élevage et d’embouteillage apparaissent dans le vignoble, ainsi que des caveaux de vente. En effet jusque-là, seules les grandes maisons de négociants de la ville de Porto pouvaient commercialiser, et l’activité de vente directe aux centaines de milliers de visiteurs qui passent chaque année dans la région était concentrée sur Porto même. Cette ouverture a permis à ces vignerons de développer dans le cadre somptueux de la vallée du Douro un commerce à la propriété qui leur ouvrait de nouvelles perspectives.

 

Le temps passé à appréhender le tissu du territoire que l’on va rencontrer est donc essentiel afin de comprendre les analogies et les différences avec son propre territoire. La phase suivante est de prendre contact avec les interlocuteurs repérés lors de l’étape précédente. L’enjeu est donc de s’assurer de la qualité du contact, de sa volonté de partager, de sa capacité à s’exprimer, et surtout de l’intérêt de la rencontre pour les participants au voyage.

 

Ainsi, pour ce déplacement, il a été prévu de rencontrer aussi bien des institutions chargées du développement de la filière que des producteurs indépendants de la vallée :

- l’IVDP : l’Institut des vins du Douro et de Porto, est un institut public relevant de l’administration indirecte de l’État, doté d’une autonomie administrative et financière et d’un patrimoine qui lui est propre. Il s’agit d’un institut public de nature interprofessionnelle. L’IVDP est chargé d’assurer le contrôle de la qualité et de la quantité de vins de Porto en réglementant le processus de production ainsi que de protéger et de défendre les appellations d’origine Douro et Porto ;

- l’AEVP : l’Association des négociants de vin de Porto est une institution privée à but non lucratif, créée en janvier 1975. Son premier objectif est la promotion du Porto. Les « associés », que nous appellerions des « adhérents » sont les producteurs de Porto. 90 % des producteurs de Porto sont exportateurs. L’AEVP ne propose pas de prestations touristiques, mais elle assure le développement et la promotion des visites de grands chais de vieillissement du Porto à Porto et dans le Douro.

 

Ces rencontres ont généré des échanges passionnés et passionnants qui ont pu parfois déborder du thème initial du voyage notamment sur l’importance d’une relation étroite entre organismes de contrôle et producteurs pour répondre à la difficile question que Portugais et Français se partagent : comment améliorer la qualité de nos vins (contrôle des éléments dangereux ou qui modifient le goût) sans porter atteinte à la créativité ?

 

Le voyage s’est ensuite poursuivi à la rencontre des domaines qui avaient investi dans la diversification par l’œnotourisme. Les échanges ont porté sur les niveaux d’investissements, sur les tailles critiques à respecter, les retours directs et indirects, les taux d’occupation, la part du temps consacré à cette activité au détriment du cœur de métier, des emplois générés… Si l’hôte accepte de répondre à toutes ces questions et à offrir son expérience, il est fondamental de veiller à ce qu’on assiste bien à un réel échange, qu’il y trouve aussi un avantage et des sources de réflexion. C’est une confrontation de situations, de systèmes, d’environnements que l’organisateur du voyage doit mettre en place. Le succès du déplacement se mesurera aussi à la poursuite des discussions entre visiteurs et accueillants au-delà du séjour.

 

Il est à noter qu’un déplacement professionnel en groupe va être aussi créateur de liens entre les participants. C’est un outil fantastique pour un syndicat, une fédération, une union professionnelle de fédérer, regrouper des membres adhérents. Les échanges au sein de groupe sont essentiels, ils sont issus des rencontres vécues et les « débriefings » vont générer des idées, des partages qui n’auraient jamais vu le jour sans le voyage.

 


D - Un programme riche, détaillé et équilibré

 

Ce voyage s’est donc déroulé du 28 au 31 mai 2010 selon le programme suivant qui a alterné visites avec des viticulteurs impliqués dans une démarche œnotouristique et visites avec des acteurs institutionnels. Une préparation minutieuse – qui a nécessité un repérage en amont sur place – a permis d’établir un planning qui a été parfaitement respecté. Aucun retard majeur ni problème logistique ne sont venus perturber le confort des participants.

 

Vendredi 28 mai

14h35 : réception à l’aéroport de Porto. Transfert de l’aéroport à l’hôtel.

15h20 : présentation de l’IVDP (l’organisme, les actions touristiques et de promotion) ; rencontre avec Manuel Lima Ferreira

16h30 : chais Taylor's à Vila Nova de Gaia. Présentation d’un chai traditionnel et du travail de vieillissement des vins de Porto ; rencontre avec Ana Sofia Borges (Visitors' centres manager) et Cristina Aguiar

18h : festival « Porto Come » en compagnie de Vasco Mela et Helena Azevedo (agence Écotours), Henriqueta Novoa (professeure et viticultrice), et Ema Pinto, chargée de promotion à l'AEVP

19h30 : dîner à la Maison des Porto avec M. Duhard, créateur et propriétaire de la Maison des Porto.

Logement à l'Hôtel Sao José à Porto


Samedi 29 mai

9h30 – 11h : transfert de Porto dans le Douro.

11h – 12h : check in à l'hôtel Poussada Solar da Rede à Mesao Frio

13h – 15h30 : Quinta da Avessada à Favaios ; rencontre avec Miguel Barros, directeur

16h – 17h : Quinta de Casa Amarela à Regua ; rencontre avec Gil Regueiro, propriétaire

18h – 19h : Quinta Da Pacheca à Peso de Regua ; rencontre avec Catarina Pimentel, propriétaire

20 h : logement et dîner à l'hôtel Poussada Solar da Rede

Logement de 3 singles à l'hôtel Regua Douro


Dimanche 30 mai

9h30 : check out hôtel Régua.

10h – 11h30 : Quinta da Padrela à Tabuaço ; rencontre avec Pedro Francisco, viticulteur

12h – 14h30 : déjeuner à la Quinta do Portal à Sabrosa ; rencontre avec Manuel Fereira, œnotourism manager

15h – 17h : Quinta do Tedo à Vila Seca ; rencontre avec Jorge Alves, directeur d’exploitation et œnologue.

17h – 19h : retour à Porto

19h – 20h : check in à l'hôtel Teatro

20h : dîner au café Guarany avec Joaquim Morais Vaz, président des Vignerons indépendants du Douro, puis possibilité d'aller visiter les locaux de L'AVEPOD.


Lundi 31 mai

7h : transfert de l’hôtel pour l’aéroport.

10h : décollage.

13h : arrivée à Tours.


E - Conclusion


Véritable outil de mobilisation des acteurs, le voyage d’études permet aux fédérations, syndicats, unions professionnelles ou services des collectivités en charge du développement, d’apporter des éclairages nouveaux, pratiques et utiles sur des problématiques précises. L’ouverture sur des expériences extérieures réussies (ou pas), offre des opportunités de rencontres, d’échanges, de dialogues de plus en plus nécessaires dans la réflexion en amont de l’acte de décision. Le déplacement physique vers une destination extérieure génère également une obligation de se détacher momentanément de son quotidien ; il permet une prise de recul nécessaire à la compréhension d’un environnement nouveau. Le voyage est ainsi propice à la réflexion sur sa propre activité à travers la découverte d’un autre contexte.


 

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