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Je tweete, tu tweetes, il tweete ...

Article du numéro 452 - 01 novembre 2012

A la une

Avoir sa page Facebook ou son compte Twitter... c'est désormais presque une évidence pour les collectivités. Sauf qu'il ne s'agit pas que de faire de la présence, mais d'utiliser ces réseaux pour communiquer réellement avec l'habitant, répondre rapidement à ses questions, informer en temps réel... Tout cela suppose une solide organisation en « backoffice », sous peine d'aller au crash de manière certaine.

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ça vous dit quelque chose #CollTerr ? Hé oui, le fameux outil de réseau social Twitter ! La communication publique entre peu à peu dans l'ère «web 2.0», pour certains avec talent, pour d'autres très maladroitement. Afin de ne plus se tromper, quelques infos...
Post, follower, hashtag : si ces mots vous sont inconnus, n'allez pas plus loin. À moins qu'un dir' com surexcité ait un jour débarqué dans votre bureau en hurlant «c'est géniaaaaaaaaal ! Il faut absolument qu'on s'y mette... Tout le monde est aujourd'hui sur Facebook !», et que vous l'ayez regardé d'un ½il torve en pensant «ça va lui passer».
Et dans les faits, le dir' com au pantalon orange n'aura pas tort. Aujourd'hui, Facebook, c'est plus d'un milliard d'utilisateurs par mois à travers le monde, plus de 24 millions en France. Twitter rassemble de son côté plus de 8 millions de Français. Chez les moins de 20 ans, les systèmes des messages privés (MP) de Facebook remplacent l'échange par mel. La France fait toujours partie des 10 pays ayant le plus d'utilisateurs. Si l'on compte, en plus, le taux d'équipements grandissant en outils de communication nomade (tablettes et smartphones), et en sachant que sur le milliard d'utilisateurs Facebook, 600 millions le font sur mobile, la voie est ouverte à une nouvelle ère de communication dite «2.0».
Et dans le 2.0, il y a les réseaux sociaux.
Mais avant de se lancer, attention, mieux vaut savoir ce qu'on fait.


Faire «comme tout le monde» ?

Mauvaise idée. Le but n'est pas «d'y être», mais bien de se poser la question «pourquoi y être» et surtout comment. 52 % des grandes villes et 35 % des départements auraient un compte Twitter... Une étude réalisée par l'agence Adverbia* montre que 55 % des régions ont également un compte Twitter et que «beaucoup semblent ne pas avoir compris le b-a ba de l'outil». Quoi de pire que d'avoir l'air ringard auprès de ses utilisateurs ? Des outils permettent des classements grâce au nombre de followers sur Twitter et de fans sur Facebook. On classe ainsi Bretagne, Picardie et Limousin dans le top 3 de Twitter. Et on comprend, avec tous ces classements de collectivités en pointe sur les nouveaux médias, l'intérêt en terme d'image «d'en être ou de ne pas en être».


Un organigramme

Avant, on avait une communication descendante : des revues et communications papier qui étaient distribuées à l'habitant. Ensuite sont venus les sites internet. On ne savait pas trop quoi mettre dedans, mais il fallait avoir son site. Puis sont arrivés les outils web 2.0, outils de communication à la fois transversale (d'internaute à internaute) descendante (la collectivité donne de l'info à l'administré) et ascendante (l'administré donne de l'info ou questionne la collectivité). Un new deal de la communication publique. Qu'il faut savoir gérer. Car qui dit feed-back immédiat et constant de l'administré dit «pouvoir répondre aux questions». Et qui dit «communication ascendante» dit «parole ouverte de l'habitant sur la toile et donc danger». Il va falloir gérer les groupuscules d'associations d'habitants et d'opposants politiques et «gérer le flux», voire, dans l'urgence, des informations pouvant nuire à la collectivité.
D'où la nécessaire implication, dès le départ, de la direction générale et du cabinet dans des projets qui ne peuvent être faits sur un bureau du service com' entre deux plaquettes. Attention, communication sensible et risques de dérapage immédiat quand on ouvre des comptes Twitter, Facebook, Google +...


Des conséquences RH

Et qui dit communication hautement sensible dit personne qualifiée pour s'en occuper. Celui qui gère ces réseaux type Facebook ou Twitter est appelé communément le community manager. Bien souvent, les directions générales l'imaginent comme le stagiaire chevelu, un peu geek, qu'on met dans un bureau près des toilettes et qui se débrouille avec ses «trucs de djeun's». Danger ! Quand Kevin, le stagiaire de 22 ans, aura à gérer le flot d'insultes d'un habitant, la question hypersensible sur ce projet de destruction d'un HLM, il se retrouvera bien seul et désarmé. Le community manager ne doit en aucun cas être isolé et inexpérimenté, il doit avoir de solides connaissances de la FPT, de ses services, être en lien constant avec un dir' com aguerri (celui au pantalon orange), et inclus dans une organisation sans faille. Quand une question sur les ordures ménagères ou la TOM lui sera posée, il devra faire patienter l'administré non pas au bout du fil, mais au bout du tweet, le temps de trouver l'info. Et rapidement, s'il vous plaît ! Une communication trop lente vous discrédite.
Le community manager est bien au centre d'une plateforme d'échanges entre administré et administration. Son rôle est crucial dans l'image renvoyée par la collectivité, le service rendu à l'habitant. Dans certaines collectivités, on pourrait l'apparenter à ces fameuses plateformes téléphoniques qui répondent à toutes les questions de l'administré 24h/24. Sauf que là, en plus, ce poste devra être occupé par un homme ou une femme dans la culture 2.0, aguerri aux outils nomades, et surfant sur la toile habilement.


Au fait, ça sert à quoi ?

À savoir qui a la plus grosse (liste de fans Facebook). Et oui, on en est souvent là...
Non bien sûr, ces outils sont d'abord une formidable source d'infos pour l'habitant : communication en temps réel, alerte en cas de chute de neige ou renvoi sur le site quand arrivent les tarifs des cantines scolaires...
Les réseaux sociaux peuvent servir d'alerte (Twitter) ou de mise en lien avec l'habitant (Facebook) en suscitant son retour. Il permet une communication sur un «autre ton», plus moderne et décontractée qu'une communication officielle, en lançant le pari de la participation, sans jamais remplacer la rencontre physique de la réunion publique. Au-delà de Facebook et Twitter, les deux géants, pourquoi ne pas se lancer dans TOUS les autres réseaux, et ils ne manquent pas : Viadeo, Linked in, Myspace, Dailymotion, Google +, Pinterest... tous ces outils de partage et de communication qui se multiplient ? Si le dir' com à pantalon orange revient dans votre bureau en voulant se lancer partout en même temps, dites-lui stop ! Faut pas pousser non plus...


Notes

* Étude Adverbia à retrouver sur le net http://fr.slideshare.net/Adverbia/étude-twitter-et-les-régions


La transparence tous azimuts n'est pas raisonnable

Laurent Bibard, philosophe

«Les NTIC c'est une merveille - il faut simplement ne pas oublier que nous sommes responsables des machines,
et non inversement. Une façon de décrire la difficulté est de souligner que, quand on peut disposer d'information, la tendance spontanée est d'en vouloir toujours plus. Ce qui entraîne un désir inconscient mais puissant de transparence tous azimuts.
Ce n'est pas raisonnable. Qu'il faille que les institutions soient moins obscures qu'elles l'ont été en France, c'est l'évidence - la bureaucratie est trop souvent devenue pouvoir au lieu de bureau. Qu'il s'agisse en retour de lier les mains de nos institutions publiques en les sommant de rendre systématiquement et exhaustivement transparentes leurs opérations pour en garantir l'efficacité maximale immédiate et constante, n'a pas non plus de sens.
Ce serait contre-productif pour tout le monde - et pour les citoyens d'abord, car étranglé, personne ne peut rien faire de bien. »


Oubliez le souhait de maîtrise absolue

Marc Thébault
Directeur de la communication, Communauté d'agglomération, Caen la mer

«L'approche des réseaux sociaux par les collectivités présente l'avantage de contraindre les responsables à changer de cadre de référence : il faut penser «stratégie» et non «outil», penser «tendance» et non pas «mode», «segmentation» et non plus «communication de masse», «processus» et pas «ROI» et, enfin, penser «coproduction» et oublier le souhait de «maîtrise absolue». Sans quoi, on ne saura trouver sa place au sein de cet univers digital qui, pour la première fois, nous offre enfin de quoi faire mieux notre travail de communicant. Principalement en nous permettant d'entrer en relation avec un public que l'on ne savait pas ou peu atteindre par nos supports traditionnels. Enfin, les réseaux sociaux nous font retoucher du doigt quelque chose que nous avons oublié : communiquer c'est émettre, puis recevoir une réaction, alors émettre de nouveau en fonction de la réponse reçue,etc. Edgar Morin parlerait ici de boucles de rétroactions. Mais on peut également et simplement évoquer qu'il s'agit ici,
en somme, de dialoguer ! Un fondamental dans la communication, non ? »


D'abord, assurer l'accès aux services publics

Matthew Wendeln, Enseignant à Sciences Po

«Pour les collectivités publiques, les réseaux sociaux doivent être plus que de la com'. Il s'agit tout d'abord d'assurer l'accès aux services publics. Au fur et à mesure que Facebook concurrence Internet comme moyen de connexion des citadins, notamment des plus jeunes, les collectivités devront en effet y mettre leurs services, comme l'a fait la ville de New York. Les réseaux sociaux sont aussi de puissants outils de dialogue. Obama n'a-t-il pas assis sa popularité avec son «Twitter Townhall» ? D'ailleurs l'interaction par les réseaux sociaux n'est pas forcément éphémère. À Rennes, le site Causes Communes permet aux habitants de dialoguer sur des questions de fond, tandis qu'outre-Atlantique Change by Us permet la véritable co-conception de projets urbains. Loin de l'image d'Épinal d'un flux de mini-messages furtifs, on assiste ici à la création d'un nouvel espace public en ligne. Pour le meilleur et pour le pire, les réseaux sociaux deviennent aussi présents qu'Internet et l'usage des mails. Aux collectivités de s'adapter ! »


Répondre à des objectifs stratégiques de communication clairs

Franck Confino, Directeur de l'agence Adverbia
http://blogterritorial.expertpublic.fr/

«Comme le montre une récente enquête (quanti et quali) publiée sur blog territorial, en deux ans, l'usage des réseaux sociaux par les collectivités s'est considérablement renforcé, mais reste à professionnaliser : seuls 26% des régions et 19% des départements ont un community manager interne ou externe. L'enjeu essentiel est que la présence publique sur Facebook, Twitter et les autres réseaux réponde à des objectifs stratégiques de communication clairs, et qu'ils permettent une nouvelle forme de dialogue avec l'administration. Le «must» étant que la parole de la collectivité s'efface pour que les citoyens s'emparent du support et produisent ce fameux «CGU» (contenu généré par les utilisateurs) : les internautes s'échangent alors les bons plans, tous types d'informations pratiques (notamment en cas de tempêtes ou intempéries) et deviennent, de fait, les meilleurs ambassadeurs du territoire auprès d'une cible exogène, peu sensible au discours auto-glorifié de l'émetteur. Aujourd'hui le temps de l'expérimentation est dépassé sur les réseaux sociaux : c'est celui de la professionnalisation.»


Docdoc

À lire

- Community manager, un nouveau métier territorial ? La Lettre du cadre n° 442, 1er mai 2012
- Internet, nouvel eldorado citoyen ? La Lettre du cadre n° 410, 1er novembre 2010

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Renseignements au 04 76 65 61 00 ou par e-mail formation@territorial.fr

Pour aller plus loin
«Constituer et animer un réseau de contributeurs de site Internet/intranet» (réf. BK248, 118 pages, version papier : 30e, version numérique : 20e, édition juil. 2011), un ouvrage de la collection Essentiel sur des éditions Territorial http://librairie.territorial.fr