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La foi sociale

Article du numéro 443 - 15 mai 2012

Idées

Un court écrit de Léon Blum pour un retour aux sources du projet socialiste. Une pièce de conviction, rédigée au lendemain de la Révolution russe et de la Grande Guerre, qui retentit sur des débats contemporains.

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Pour être socialiste
Léon Blum, Albin Michel


Un court écrit de Léon Blum pour un retour aux sources du projet socialiste. Une pièce de conviction, rédigée au lendemain de la Révolution russe et de la Grande Guerre, qui retentit sur des débats contemporains. Et qui permet certainement de bien cliver les opinions. Réédition heureuse, ce court essai, publié en 1919, est dédié à son fil Robert et destiné à tous les jeunes gens. Il se situe, historiquement, entre, d'un côté, l'affaire Dreyfus et la Première guerre mondiale, et, de l'autre, le congrès de Tours et le Front populaire. La plume de l'étudiant passé par Normale Sup', membre du Conseil d'État, prend toute sa dimension dans un engagement presque religieux.


Une doctrine militante

Léon Blum, dont André Comte-Sponville fait, dans sa préface tonique, un « indigné », livre une synthèse doctrinale et militante. Relevant, à la manière des juristes de l'époque, la dépendance mutuelle croissante des individus, il estime qu'elle commande une mutualisation des moyens de production. Affirmant sa « foi » (c'est son mot) en la justice et en l'homme, il voit naître le socialisme « du contraste, à la fois scandaleux et désolant, entre le faste des uns et les dénuement des autres, entre le labeur accablant et la paresse insolente ».
S'élevant contre un soit-disant ordre des choses, il fustige misère et exploitation tout en se montrant réservé sur le salariat. Sociologue, il décrit des classes sociales aux frontières plus poreuses, mais demeurant opposées, ennemies même. Une ambition socialiste serait de développer les aptitudes personnelles, tout en combattant les privilèges des nantis (que protège, en réalité, le « régime bourgeois »). Désacralisant la propriété, critiquant l'argent (qui pervertit), Blum donne à la doctrine socialiste une visée : réaliser la fraternité et l'égalité. Envisageant les contradictions et railleries que soutiennent ses contradicteurs, il alimente une charge comme les « parasites » seulement menés par l'appât du gain. Pour un travail vraiment créateur, contre l'injustice foncière, le capitalisme qui engendre les guerres et les aléas de la naissance, Blum dessine les lignes d'un socialisme qui amène à une société d'associés permettant « l'exploitation rationnelle et la distribution équitable » des richesses de l'humanité.


Route du progrès ou de la servitude ?

Le tout doit conduire sur la « route du progrès », que d'autres, libéraux, baptiseront plus tard la route de la servitude. Dans ce discours à la jeunesse, l'auteur appelle explicitement à une révolution spirituelle, pour, comme le disait l'autre, passer de l'ombre à la lumière. Et il insiste en soutenant que le socialisme est une morale et presque une religion, autant qu'une doctrine. Un siècle plus tard, chacun pourra se situer par rapport à ces propos vigoureux, dans un concours de condamnation, d'adaptation, de récupération ou de célébration de la pureté socialiste. Les socialistes actuels, dans leur diversité, apprécieront certainement diversement. Les libéraux, en front commun, critiqueront radicalement. À lire en tout cas.