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Guide des usages, du protocole et des relations publiques > Partie 4 Les symboles du pouvoir > V • La carte d’identité de maire

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VI • Cocardes et gyrophares

Fiche pratique n° 2  Le protocole de retransmission des conseils municipaux en direct

 

Grenoble, Lyon, Marseille, Nice ou Montpellier, Jeumont, Pau… autant de communes qui se sont lancées, avec des solutions techniques diverses, dans l’organisation des conseils municipaux en direct. Mesure de démocratie locale, de transparence, souvent liée à des engagements politiques issus des programmes électoraux, la mise en place des conseils municipaux obéit à des règles concrètes qui sont rappelées ici. D’abord, elle doit épouser le processus d’organisation juridique des séances du conseil municipal dans lequel elle s’inscrit. Ensuite, elle doit intégrer les principes de la publicité audiovisuelle des débats dont les grandes lignes sont rappelées. Enfin, elle doit prendre en considération un protocole bien précis – quelle que soit la solution technique retenue – d’organisation de la retransmission en direct.

 

A - Rappeler les règles propres au fonctionnement du conseil municipal

 

Il s’agit ici de rappeler que le conseil municipal fonctionne selon des règles précises, généralement maîtrisées par les secrétariats généraux, les questures ou services de l’assemblée. Mais s’agissant d’une retransmission en direct, il est important de veiller au respect de ces règles basiques dont l’omission deviendrait un problème. Nous rappelons ici les points incontournables à prendre en compte.

 

1. Tenue des réunions : un rythme minimal à rappeler

 

Le conseil municipal se réunit au minimum une fois par trimestre sur convocation du maire. Ce rythme suffit parfois, en particulier quand la taille de la commune ne justifie pas de nombreuses décisions et que la faculté de délégation au maire a été fortement utilisée.

De plus, le maire peut réunir l’assemblée délibérante de sa propre initiative chaque fois qu’il le juge utile. Notons qu’il est tenu de réunir le conseil municipal dans un délai maximal de trente jours suivant la demande motivée :

- du représentant de l’État dans le département (ce délai peut être réduit à la demande du représentant de l’État en cas d’urgence) ;

- du tiers au moins des conseillers municipaux en exercice dans les communes de 3 500 habitants et plus ;

- ou de la majorité des membres du conseil municipal dans les communes de moins de 3 500 habitants.

 

2. Lieu : en mairie

 

Le conseil municipal doit, en principe, être réuni en mairie, et il n’est possible de déroger à ce principe que pour une raison valable : exiguïté de la salle du conseil, normes de sécurité ou travaux d’agrandissement… Aucune disposition ne régit la durée du conseil municipal, « raisonnable » et susceptible de n’être interrompue que de courtes suspensions, consenties par le président. Le conseil peut décider de renvoyer tout ou partie de la séance à une séance ultérieure, nécessitant une nouvelle convocation. Les séances sont publiques, les spectateurs ne pouvant intervenir. Toutefois, sur la demande de trois conseillers municipaux ou du maire, le conseil municipal peut décider, sans débat, à la majorité absolue des membres présents ou représentés, de se réunir à huis clos. Toute séance tenue à huis clos sans la décision préalable du conseil municipal est irrégulière. La décision de recourir au huis clos doit être justifiée. Un juge peut donc être amené à vérifier que la décision de siéger à huis clos ne repose pas sur un motif matériellement inexact, qu’elle n’est pas entachée d’erreur de droit, d’erreur manifeste d’appréciation ou de détournement de pouvoir.

 

À souligner
Retransmettre un conseil municipal en direct exigera le respect plus particulier de toutes les dimensions juridiques liées à l’organisation du conseil. Sous l’œil de la caméra, tout se voit et prend une résonance particulière. Ainsi en va-t-il des droits de l’opposition, par exemple, dont le nécessaire respect s’imposera à tous avec une retransmission, matière à « polémique ».


 

3. Délai et forme pour la convocation

 

Dans les communes et les EPCI (art. L.2121-7 à L.2121-28 du CGCT), toute convocation doit être faite par le maire ou la personne en ayant délégation. Elle doit indiquer les questions portées à l’ordre du jour et être mentionnée au registre des délibérations. La convocation doit être affichée ou publiée, et impérativement adressée aux conseillers municipaux par écrit et généralement envoyée au domicile.

Pour les communes de moins de 3 500 habitants, la convocation est adressée au moins trois jours francs avant la réunion.

Pour les communes de 3 500 habitants et plus, ce délai correspond à cinq jours. En cas d’urgence, ce délai peut être abrégé par le maire, à condition qu’il ne soit pas inférieur à un jour franc. La convocation doit comporter la liste de toutes les questions à l’ordre du jour. À défaut, la sanction est simple : l’annulation des délibérations correspondantes. Le délai part à compter de la date d’envoi (cachet de la poste) et non celle de la réception, quand la convocation est adressée par voie postale.

Le maire peut décider de raccourcir ce délai en respectant le délai d’un jour franc en cas d’urgence, contrôlée par le juge. Seules deux façons existent de démontrer que l’on a respecté les délais de convocation : la remise en mains propres contre décharge ou la lettre recommandée (sans accusé de réception). Les procédés comme les courriers simples ou e-mails sont admis, mais sont susceptibles de provoquer des difficultés de preuve en cas de contestation. En cas de modification de l’ordre du jour, une convocation complémentaire peut être adressée, mais elle devra respecter les formes et les délais classiques. Notons que la convocation doit être mentionnée au registre des délibérations et publiée ou affichée à la porte de la mairie. Une note de synthèse suffisamment détaillée sur les affaires soumises à délibération est en outre jointe pour les communes de 3 500 habitants et plus.

 

À noter
La convocation n’est pas un élément visible dans l’organisation d’un conseil municipal en direct mais c’est un sujet éminemment sensible. On veillera donc, là encore, à ce que cet aspect réglementaire (délai en particulier) soit bien géré pour éviter un éventuel sujet de division fort dommageable.


 

4. Rôle de la note de synthèse

 

L’article L.2121-12 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. Ce document participe à la bonne information des conseillers municipaux, préalablement aux séances. Il leur permet de délibérer en toute connaissance de cause.

 

À noter
Là encore, il s’agit d’un point administratif important : une note de synthèse mal rédigée ou incomplète peut engendrer des débats sans fin au sein du conseil, débats exacerbés par le direct. Il s’agira donc d’y être attentif !


 

5. Respecter les règles liées au quorum

 

Le conseil municipal ne délibère valablement que lorsque la majorité de ses membres en exercice est présente (CGCT, art. L.2121-17). En dessous de ce nombre de conseillers présents, les délibérations ne seraient pas valables. En cas d’échec d’une première convocation, la réunion suivante a lieu sans condition de quorum, mais un intervalle minimum de trois jours entre les deux séances est requis. Tout quorum doit être vérifié non seulement au début de la séance, mais également délibération par délibération, sauf en ce qui concerne la séance d’élection du maire et des adjoints. Pour le calcul du quorum, seuls sont effectivement pris en compte les conseillers en fonction, à l’exception de ceux personnellement intéressés à l’affaire et de ceux auxquels une disposition légale interdit de prendre part au vote. Tout départ de membre en cours de séance est mentionné au procès-verbal et doit entraîner une vérification du quorum.

 

À souligner
Sans quorum, pas de tenue valable du conseil donc pas de direct ! Respect impératif…


 

6. Police de l’assemblée

 

La police de l’assemblée appartient au maire. Lorsque les dispositions de l’article L.2122-17 du Code général des collectivités territoriales s’appliquent, cette fonction incombe à son suppléant.

Il faut distinguer les pouvoirs détenus par le maire (ou son remplaçant) au titre de la police de l’assemblée (article L.2121-16 du Code général des collectivités territoriales) – il doit maintenir l’ordre public au cours de la séance, et faire expulser de l’auditoire ou arrêter tout individu qui troublerait cet ordre public – et ceux que lui confère l’article L.2121-14 du même Code en qualité de président du conseil municipal. Au titre de l’article L.2121-14, le rôle du maire se limite à assurer la direction des débats.

À l’égard des conseillers municipaux, il n’a pas de pouvoir de police, mais simplement la qualité de président de séance. Toutefois, si un conseiller municipal trouble la séance, c’est au maire de faire respecter les dispositions légales sur les débats et les délibérations, ainsi que le règlement intérieur. Dans cet objectif, il peut prendre des décisions sous forme d’injonctions ponctuelles, de rappels à l’ordre.

Le maire n’a aucun pouvoir sur le fonctionnement même du conseil municipal. Il appartient, en effet, au conseil municipal de réglementer ce fonctionnement, soit par délibérations ponctuelles, soit par le biais du règlement intérieur.

 

À souligner
La police de l’assemblée est importante, même si le terme peut sembler impropre ou sévère. Parmi les attributions dont dispose le maire pour maintenir le bon ordre des séances du conseil municipal, on dénombre la possibilité de faire expulser de l’auditoire toute personne étrangère au conseil ou un conseiller municipal, par ses propres moyens ou en requérant la force publique, ou encore d’arrêter tout individu qui trouble l’ordre (Rép. min. n° 35472, JOAN Q du 6 mai 1996 ; TA Besançon, 15 avril 1999, n° 961021). En direct, l’objectif sera bien entendu d’éviter tout incident qui prendrait une dimension gênante. Objectif de ce pouvoir : assurer des débats équilibrés, ce qui est l’intérêt de tous avec une retransmission.


 


7. Débats précédant l’adoption d’une délibération

 

Toute délibération doit donner lieu à une discussion préalable en séance, les conseillers pouvant s’y exprimer oralement. La possibilité de poser des questions orales, de proposer des amendements ou l’expression d’opinions concrétisent ce droit.

L’expression libre de chacun doit être garantie au-delà des sensibilités politiques, le règlement pouvant néanmoins valablement (et sans excès) limiter le temps de parole des conseillers. Leur libre expression suppose néanmoins une information suffisante quant aux affaires traitées, les débats se trouvant relatés dans le procès-verbal. En direct, la qualité des débats, le respect des temps de parole raisonnables seront bien entendu primordiaux, si l’on entend conserver son « audience ».

 

8. Organiser les modalités des prises de parole

 

L’article L.2121-19 du CGCT dispose que « les conseillers municipaux ont le droit d’exposer en séance du conseil des questions orales ayant trait aux affaires de la commune. Dans les communes de 3 500 habitants et plus, le règlement intérieur fixe la fréquence ainsi que les règles de présentation et d’examen de ces questions. À défaut de règlement intérieur, celles-ci sont fixées par une délibération du conseil municipal ».

Le conseil municipal doit, soit dans le règlement intérieur, soit dans une délibération lorsque la collectivité n’est pas dans l’obligation d’adopter un règlement intérieur, prévoir non seulement la fréquence des questions orales mais aussi les règles de leur présentation et de leur examen.

Si la mise en œuvre de ce droit peut être limitée pour tenir compte notamment de la nature et du nombre de questions inscrites à l’ordre du jour, sans préjudice de l’exercice des pouvoirs de police de l’assemblée par le maire, il apparaît qu’une mesure générale d’un règlement intérieur limitant le droit d’expression de chaque conseiller à trois minutes par point inscrit à l’ordre du jour peut, dans certains cas, restreindre de façon excessive le droit d’expression des membres du conseil municipal.

Attention toutefois à ne pas trop encadrer le fonctionnement du conseil municipal : une fois adopté, le règlement intérieur emporte force obligatoire !

 

9. Accès du public à la salle

 

Le caractère public des séances du conseil municipal est la règle incontournable (art. L.2121-18, CGCT). Dès lors, la salle doit être libre d’accès pour toutes personnes, dans la limite des places matériellement disponibles. L’accès à la salle de réunion du conseil municipal peut néanmoins être restreint pour des impératifs de sécurité et d’ordre public (CE, 14 décembre 1992, n° 128646).

Le droit d’accès aux séances comprend le droit d’entendre les débats et de prendre des notes, sans participation ou trouble de l’ordre du conseil municipal.

À titre exceptionnel, le conseil municipal peut décider qu’il siégera à huis clos.

 

À souligner
Attention : une retransmission en direct peut se faire au détriment de la fréquentation du public. Autant y penser !


 

Respecter le droit d’expression des élus, plus encore en direct
 
Les conseillers municipaux disposent d’un véritable droit de parole au sein de l’assemblée délibérante, qui se traduit principalement par leur participation aux débats. Le maire, qui préside les débats, exerce la « police de l’assemblée », en particulier afin d’éviter d’éventuels débordements. Les conseillers municipaux ont le droit de proposer des amendements aux textes élaborés par l’exécutif. Ce droit d’amendement peut, certes, être encadré par le règlement intérieur, afin d’assurer l’information des membres de l’assemblée et le bon déroulement des débats, mais son existence même ne peut être remise en cause. Ensuite, les conseillers ont le droit de poser des questions sur les affaires relevant de la compétence de la collectivité, même concernant des sujets non inscrits à l’ordre du jour, y compris si aucune délibération ou règlement intérieur ne l’a expressément prévu. Dans les communes de plus de 3 500 habitants, ce droit est en principe encadré par le règlement intérieur, tandis que, dans les communes de population moindre, la fréquence ainsi que les règles de présentation et d’examen de ces questions peuvent faire l’objet d’une délibération du conseil municipal. Le refus du maire de répondre peut, s’il n’est pas motivé, être contesté devant le juge.

 

B - Maîtriser les règles de la publicité audiovisuelle des débats

 

Le droit de toute personne à user de moyens de communication audiovisuelle pour l’enregistrement et la retransmission des débats est expressément prévu par la loi et bénéficie aussi bien à l’auditoire public qu’aux membres du conseil municipal. L’autorisation légale d’enregistrement et de retransmission des débats trouve néanmoins ses limites dans la préservation du bon déroulement des débats et de l’ordre public.

 

1. La règle à rappeler

 

C’est une question très fréquente à l’heure où nombre de communes s’engagent dans la retransmission des conseils municipaux en direct. Le principe de publicité des séances du conseil municipal (CGCT, art. L.2121-18) permet aux conseillers municipaux et aux membres de l’assistance d’enregistrer les débats et de les diffuser, le cas échéant, par Internet (Rép. min. n° 5849, JO Sénat du 4 décembre 2008, p. 2435). Le législateur a, en effet, expressément prévu que pour les séances susceptibles d’être retransmises par des moyens de communication audiovisuelle, l’accord des élus n’est pas nécessaire : quand ils s’expriment dans l’exercice de leur mandat, la diffusion des débats n’est pas de nature à porter atteinte à leur droit à l’image protégé exclusivement dans le cadre de la vie privée (Code civil, art. 9.).

 

L’article L.2121-18, al. 3 du CGCT dispose, de son côté, clairement que : « Sans préjudice des pouvoirs que le maire tient de l’article L.2121-16, ces séances peuvent être retransmises par les moyens de communication audiovisuelle. » Le droit de toute personne à user de moyens de communication audiovisuelle pour l’enregistrement et la retransmission des débats est donc expressément prévu par la loi. Il est valable tant pour l’auditoire public que pour les membres du conseil municipal. A contrario des membres du public, les conseillers municipaux ne peuvent en prendre l’initiative à titre individuel, mais avec l’accord et comme représentants du conseil municipal.

Le Conseil d’État a rappelé qu’aucun texte ne réglemente l’usage du magnétophone et, aujourd’hui, d’autres procédés d’enregistrement et de retransmission. L’autorisation légale d’enregistrement et de retransmission des débats n’est « limitée » que dans la préservation de l’ordre public. De plus, en vertu de son pouvoir de police de l’assemblée (CGCT, art. L.2121-16), le maire ne peut interdire l’enregistrement que si celui-ci est de nature à troubler le déroulement normal des séances (Rép. min. n° 35890, JOAN du 10 février 2009 p. 1369).

 

À retenir
Aucun texte n’interdit donc l’enregistrement des séances du conseil. Cet enregistrement peut être réalisé indifféremment par les services municipaux, un membre du conseil ou un tiers appartenant au public. Il a été jugé que le règlement intérieur d’un conseil municipal ne pouvait légalement prévoir un régime d’autorisation pour l’enregistrement des débats par un des membres du conseil, cette disposition donnant au public plus de droits qu’aux élus. Seuls les pouvoirs de police du maire « impactent » le public (CA de Bordeaux, 2e ch., n° 10BX02707, 3 mai 2011, Commune d’Espalion).


 

2. Un droit à l’image « limité »

 

Une séance de conseil municipal est par définition « publique » sur le plan du droit, édicté en l’espèce par le Code général des collectivités territoriales. Les élus qui y siègent, de surcroît dans un bâtiment public, étant présents dans le cadre de leur mandat électif, leur droit à l’image n’est plus opposable à un tiers pour ce qui concerne la captation. Un élu ne peut siéger visage caché et ne peut refuser d’être filmé dans l’exercice de son mandat.

Il peut donc s’agir d’une séance de conseil municipal, mais aussi de toute manifestation publique où l’élu est présent en qualité d’élu dès lors que l’on peut aisément justifier qu’il n’était pas présent à titre personnel. Ainsi, un élu, même en tenue décontractée, peut être filmé ou photographié par exemple lors d’une inauguration d’une fête, d’un événementiel, d’une remise de trophées…

C’est en ce qui concerne la publication qu’il faut être plus prudent. En effet, la loi précise bien que les images des élus doivent présenter un caractère illustratif probant, donc avoir un lien substantiel avec le contenu de l’article ou bien avoir un caractère historique.

C’est sur le seul détournement de l’usage que l’élu peut, le cas échéant, poursuivre.

 

À noter
Les justifications techniques d’une limitation de l’exercice du droit à la publicité audiovisuelle peuvent tenir aussi bien aux conditions matérielles d’accueil du public qu’aux moyens de communication audiovisuelle dont il est fait usage. Le maire n’est tenu d’accueillir le public aux séances du conseil municipal que dans la mesure des capacités d’accueil de la salle et de l’espace réservé à l’auditoire. Un tribunal a pu estimer que, pour apprécier le respect de la publicité des débats, il convenait de prendre en compte l’importance de la commune et de tenir compte « des installations et des ressources locales ».


 

3. Le maire et le conseil, autorités compétentes

 

Seuls le maire ou, selon le cas, le conseil municipal dans son ensemble, sont compétents pour restreindre la liberté de toute personne à fixer et retransmettre les débats du conseil municipal. Le maire dispose d’un pouvoir de police à l’égard du public fondé sur l’article L.2121-16 du CGCT. Il peut ainsi adresser des injonctions ponctuelles pour pallier un trouble, ou adopter a priori toutes mesures propres à éviter des récidives. Cette disposition lui permet de réglementer l’usage des procédés de captation des débats par le public, ce qu’il fait en général par voie d’arrêtés de portée générale et permanente. Vis-à-vis des conseillers municipaux, le maire n’a que la qualité de président de séance (comme toute autre personne qui présiderait le conseil). Il est chargé, dans ce cadre, de faire respecter le règlement intérieur du conseil municipal.

Ce règlement intérieur, qui peut prévoir les modalités d’enregistrement des débats par les conseillers, ne peut être voté que par ceux-ci. Les conseillers municipaux ont donc seuls compétence pour décider des règles limitatives de la publicité audiovisuelle des débats, qui s’appliqueront à eux.

Le pouvoir du maire en qualité de président de séance doit donc s’inscrire dans le cadre et venir en application de ce règlement intérieur. Toute mesure prise par le maire qui viendrait restreindre la faculté des conseillers d’enregistrer les débats et qui ne correspondrait pas à une disposition du règlement intérieur se trouverait alors illégale. Il convient de noter que le règlement intérieur n’est applicable qu’aux membres du conseil municipal et n’est donc pas opposable au public.

 


4. Un trouble apprécié avec modération

 

Cette notion de « trouble » du bon ordre des travaux de l’assemblée délibérante semble toutefois être appréciée de façon assez restrictive par la jurisprudence administrative, laquelle rappelle fréquemment que le droit d’enregistrement du conseil municipal ne peut être limité que si les circonstances y obligent, et en aucun cas pour une question de qualité des réunions. Le juge administratif appréciera donc ces situations au cas par cas.

L’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux du 3 mai 2011 indique que « le règlement intérieur de l’assemblée ne saurait […] soumettre l’utilisation par les conseillers municipaux des moyens d’enregistrement audiovisuel à autorisation préalable alors que ce régime d’autorisation préalable ne résulte d’aucun texte de nature législative ou réglementaire, qu’il aboutit à donner moins de droits aux conseillers municipaux qu’aux membres du public assistant aux séances et que la commune ne fait état d’aucune circonstance particulière qui permette de regarder comme nécessaire une telle mesure ».

S’il appartient au maire de prendre les mesures propres à assurer le déroulement normal des délibérations du conseil municipal, la limitation de l’usage d’appareils d’enregistrement (film ou audio) ne sera légale que si les circonstances particulières la rendent indispensable. Le juge appréciera alors souverainement si les enregistrements peuvent « troubler » le bon ordre des travaux du conseil municipal.

Dans certains cas, l’utilisation d’un appareil enregistreur au sein d’une réunion peut limiter la spontanéité des échanges, en compliquant la prise de parole. La cour a considéré que, par ses enregistrements, l’administré n’avait pas ici troublé « le bon ordre des travaux » du conseil ; dès lors, la décision d’interdiction du maire a été jugée illégale.

Une limitation partielle des enregistrements, en imposant la nécessité d’obtenir une autorisation préalable, émarge à la même analyse. Dans un jugement du 5 mai 2008, le tribunal administratif de Nice a eu l’occasion de préciser que « l’enregistrement audiovisuel ne peut pas être soumis à un régime d’autorisation préalable ». Dans l’hypothèse où cette autorisation préalable d’enregistrement ne serait pas imposée au public, mais seulement aux conseillers municipaux, la même réponse est de rigueur.

 

C - Proposer la retransmission en direct

 

Retransmettre un conseil municipal en direct exige un protocole technique – des caméras, un serveur d’hébergement pour « envoyer » l’image vers un site, un habillage de ce qui est retransmis sur le site Internet local. Chaque commune devra bien entendu adapter le dispositif technique – caméras mobiles ou fixes – à ses moyens humains et financiers.

Au préalable, certains points doivent être soulignés. D’abord, retransmettre le conseil en direct n’est pas un choix qui doit se prendre à la légère : il est généralement issu d’un engagement programmatique, d’une commande politique ou d’une volonté clairement exprimée de transparence. Cela impliquera bien entendu de mesurer tout à la fois les contraintes techniques comme les incidences financières associées à la commande publique – nécessité de passer un marché.

 

1. Choisir un rythme et un média

 

Les conseils municipaux sont réguliers (lire le point 1. du A). Certains comportent des questions de gestion courante – créations de poste, urbanisme – d’autres des enjeux stratégiques : c’est le cas du vote du budget, souvent considéré comme l’acte majeur dans une collectivité. Il peut s’avérer intéressant de choisir un rythme de retransmission : s’agit-il de tous les conseils municipaux, de quelques-uns à forts enjeux ?

Choisir un rythme est le préalable : il peut conditionner une forme de banalisation de l’initiative ou au contraire donner du sens à la retransmission. Ce qui est rare est cher ! La volonté d’amortir un système « coûteux » peut justifier de privilégier le direct systématique, mais sans doute convient-il de ne pas trop banaliser ce type de retransmission au risque de perdre en audience.

Le choix existe aussi du média : le site Internet est la règle (nécessitant parfois quelques réaménagements), mais certaines villes peuvent choisir un canal local de télévision quand elles en disposent.

 

2. Faire connaître la démarche

 

Retransmettre le conseil municipal en direct n’aurait pas de sens si les gens n’en sont pas informés. Assister à une retransmission sur le net nécessite un acte de volontariat : celui de se connecter parce qu’on est au courant de cette retransmission. Il conviendra dès lors d’utiliser tous les canaux d’information disponibles (mensuel ou trimestriel municipal, site Internet, newsletter) pour faire connaître cette démarche. Dans le même esprit, le site Internet devra mettre en avant une fenêtre – avec, pourquoi pas, une bande-annonce – indiquant la prochaine retransmission. Il faut donc insister sur l’importance d’accompagner cette démarche d’information et de transparence dans la durée pour éviter la banalisation de ces retransmissions.

 

Nous avons listé ici un certain nombre de recommandations :

- d’abord, la retransmission ne doit pas faire dévier le conseil municipal de sa vocation première qui est de rester une instance délibérante. En termes de protocole, c’est une dimension essentielle : le procédé de retransmission ne doit pas être trop envahissant : taille des caméras, présence de trop nombreux intervenants… Il faut penser un dispositif léger qui s’adapte à la salle et non l’inverse. Autrement dit, il faut partir de la salle existante pour proposer une solution technique adaptée. La technique est au service de la démocratie dans cette démarche. Cette recommandation générale est essentielle : à quoi servirait de mettre en place une telle démarche si elle devait prendre le dessus sur ce qu’elle est censée montrer ? Nous proposons donc de rechercher des dispositifs discrets en termes d’occupation de l’espace, de nombre d’agents mobilisés. Cela n’est pas qu’une question de coût, mais bien de proportionner le dispositif avec l’installation de la salle ;

- ensuite, il faut veiller à ce que les détails habituels liés à l’installation de la salle du conseil soient « soignés ». Apposer la Marianne et la photo du président de la République constitue ainsi un « usage courant et conforme à la tradition républicaine ». Aucun texte législatif ou réglementaire, aucune règle coutumière reconnue par la jurisprudence n’obligent à l’apposition de l’une ni à la présence de l’autre. Le ministère a rappelé que l’idée de créer une image de la liberté « sous les traits d’une femme vêtue à l’antique, debout, tenant de la main droite une pique surmontée du bonnet phrygien ou bonnet de la liberté » date du décret de la Convention du 22 septembre 1792 qui avait adopté la proposition de l’abbé Grégoire, chargé d’un rapport sur les sceaux de la République. Il cite aussi la recommandation du gouvernement provisoire, en 1848, d’utiliser le buste réalisé par le sculpteur Dubray, tout en soulignant que, depuis, « les pouvoirs publics n’ont pas estimé devoir imposer un modèle spécifique de l’effigie de la République ». Nul texte n’impose donc de modèle spécifique aux maires, ni même ne les oblige à placer une Marianne dans leur mairie, mais il est de bon usage de le faire. Et c’est sans doute plus opportun encore pour donner une dimension véritablement républicaine à sa retransmission que de se montrer attentif aux symboles de la République, obligatoires ou pas ;

- faire le choix de l’interne ou de la prestation. Selon que les communes sont équipées ou pas de vidéo, de moyens humains dédiés (cadreurs), elles pourront choisir l’un ou l’autre des scénarios. Faire le choix d’internaliser totalement la retransmission des conseils suppose un niveau d’équipement spécifique qui est rare : disposer de caméras est répandu, mais direct n’est pas captation. Le processus technique est plus exigeant. La compression du signal envoyé sur le net demande un niveau d’équipement informatique conséquent. La commande publique (lire notre modèle de cahier des charges) a des chances de s’imposer s’agissant d’un équipement coûteux – de 20 000 à 40 000 euros – qu’il faudra amortir sur le mandat, dans la durée. Le choix des prestations comporte ses limites : multiplier les prestations lors des différents conseils aura vite un aspect prohibitif ;

 

À souligner
Pour fonctionner efficacement dans un domaine encore expérimental, il faut s’appuyer sur un cahier des charges précis décrivant le processus technique de retransmission (au besoin avec un schéma, ce qui aidera à la compréhension), lister le matériel nécessaire ou son équivalent et prévoir une procédure de marché adaptée qui permette de débattre sur les prix proposés par les prestataires. Il est important de penser aux questions de maintenance du matériel acquis, aux capacités d’intervention rapides de ceux qui fournissent le matériel et de trancher sur une installation mobile de la salle – caméras « nomades » – ou d’un équipement pérenne dont la limite sera de ne pouvoir être utilisé à autre chose.


 

- veiller à la qualité du son. En direct, tout « détail » a son importance. La qualité du son en est un. Il faut pouvoir compter une « perte » possible lors de la prise de son (compression). Dès lors, on veillera tout particulièrement à ce que le dispositif de micros généralement « commandés » par le maire permette à chacun d’être audible lors de la retransmission. Réaliser des essais dans les conditions du direct sera évidemment nécessaire ;

- coordonner direct, puis différé. Certes, le direct est la véritable nouveauté pour les villes qui se lancent. Proposer le conseil en direct peut s’avérer attractif lors des premières séances puis retomber comme un soufflé lors des conseils suivants. Il faudra donc aussi veiller à la mise en ligne sans délais du différé que ne manqueront pas de regarder les élus municipaux dès la séance terminée. Il faut donc aussi s’attacher à la présentation du différé, complémentaire du direct le soir même ;

- veiller à l’habillage graphique. Cela signifie de valoriser la présentation des séances suivantes sur le média choisi (site Internet en général) : habillage graphique, annonce de la date, accompagnement en texte…

 

En conclusion, ce qu’il faut retenir
Le procédé de retransmission des conseils municipaux en direct doit d’abord être appréhendé techniquement. Il faut y travailler collectivement en associant un certain nombre de services concernés : secrétariat ou direction générale, cabinet du maire, service informatique, questure de l’assemblée, communication, chacun de ces services pouvant apporter sa part à ce dispositif. Le projet doit être porté collectivement. Un certain nombre de points concrets doivent être tranchés : équipement mobile ou définitif de la salle. Pour arbitrer ce point, il faut se poser la question de ce qu’on entend faire de ce système : retransmettre d’autres événements locaux en direct (au risque d’en affecter la fréquentation) ou se limiter aux conseils municipaux : tous ou quelques-uns. Informer l’ensemble des élus est essentiel : une note préalable du maire pourra leur décrire la démarche qui les concerne au premier chef. C’est une information qui leur est due puisqu’ils siègent. On insistera sur le fait que le dispositif doit s’adapter à la configuration de la salle et à l’organisation de l’assemblée telle qu’elle existe. En aucun cas le dispositif technique retenu ne doit prendre le pas sur les débats de l’assemblée délibérante : discrète, la technique ne doit pas engendrer une multiplication des moyens humains (cadreurs…) au risque de perturber le fonctionnement de l’instance décisionnelle. Attention aussi à ne pas multiplier la sous-traitance ou les prestations à répétition au risque de voir les coûts s’envoler. On veillera aussi à ce que la retransmission en direct ne se traduise pas par des prises de parole rallongées ou des postures destinées à être vues. Le règlement intérieur est, en général, précis sur les modalités d’intervention des élus. Enfin, on insistera sur l’importance de la scénographie de cette instance : en direct, tout est visible pour l’internaute. Les détails comptent : un élu qui consulte ses textos ou même dort se verra. Consigne sera passée de respecter de simples règles de courtoisie, ce qui au fond, s’agissant d’une assemblée républicaine, est normal.
 

 

Références juridiques
- Code général des collectivités territoriales (CGCT), art. L.2121-22, L.3121-8, L.4132-6 et L.5211-6.
- CGCT, article L.2121-18.


 


Exemple de cahier des charges techniques
(à compléter et personnaliser sur la partie technique)

 

RETRANSMISSION AUDIOVISUELLE DES SÉANCES DU CONSEIL MUNICIPAL EN DIRECT SUR LE SITE INTERNET DE LA VILLE DE…

 

Préambule

Dans le but d’élargir les dispositifs d’information citoyenne de l’ensemble de la population, la retransmission en direct (streaming) des séances du conseil municipal sur le site Internet de la ville a été actée dans le cadre du mandat municipal.

 

Article 1er : Objet du marché

Le présent marché a pour objet l’achat de matériel nécessaire à l’enregistrement audiovisuel des séances du conseil municipal et au traitement des données en vue de leur transmission en streaming via le site Internet de la ville de… L’installation devra fonctionner avec un technicien vidéo (cadreur réalisateur) + un technicien son. Le signal vidéo final, encodé en H264, sera envoyé vers une plate-forme de diffusion streaming type Dailymotion.

 

Article 2 : Spécifications techniques du matériel demandé

1 caméra avec pied et batteries

1 mélangeur

1 moniteur

1 carte d’acquisition

1 PC portable

2 micros d’ambiance

Câbles

Kit de câblage nécessaire à l’ensemble du dispositif

 

Article 3 : Assistance technique lors de l’installation du dispositif

Le prestataire pressenti fournira une prestation d’installation, de paramétrage et de test sur une manifestation autre que le conseil municipal (réunion citoyenne, conseil municipal enfants, conseil consultatif retraités…) préalablement à la première séance filmée du conseil municipal. Cette séance de test permettra d’effectuer les réglages nécessaires à l’optimisation du rendu final.

 

Article 4 : Service après-vente et dépannage

En cas de défaillance de l’un des éléments du dispositif – caméra, mélangeur, moniteur, carte d’acquisition et PC –, le prestataire assure l’assistance par tout moyen à son niveau : prêt de matériel de remplacement, dépannage etc., permettant d’assurer la retransmission.

 

Article 5 : Garantie du matériel et des travaux de câblage

Extension de garantie pièces et main-d’œuvre minimale de… ans.


Retrouvez des milliers de modèles en ligne,
rédigés par des professionnels, à télécharger
sur www.modeles-experts.com

 

Bruno Cohen-Bacrie

Directeur de la communication de la ville d’Echirolles

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