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Seine-Saint-Denis : l'ère de l'administration 2.0

Article du numéro 405 - 15 juillet 2010

Administration électronique

À l'heure où l'informatique et internet ont fait une entrée en force dans le quotidien des citoyens comme des administrations, le conseil général de Seine-Saint-Denis se met au goût du jour avec un travail d'envergure : le projet « Administration 2.0 » a pour vocation de faciliter la relation entre les habitants et le département, mais aussi entre les agents, en interne.

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Quand le socialiste Claude Bartolone prend la tête du conseil général de Seine-Saint-Denis en 2008, il lance une grande démarche de modernisation de l'administration. L'objectif : gagner en lisibilité auprès des citoyens et des agents ; un projet qui trouvera naturellement sa place au sein de l'Agenda 21 mis en place au même moment. La démarche globale, après une large étude, se traduira par cinq orientations déclinées en 136 fiches actions au total.

Reste à appliquer concrètement ces fiches-actions... et pour cela, le département doit commencer par se mettre à jour sur le plan de l'informatique et de la communication interne et externe : c'est ainsi que le chantier administration 2.0 voit le jour en s'intégrant dans le projet d'administration. Pour Nicolas Soudon, directeur de la stratégie et de l'organisation, « c'est une démarche classique qui est menée dans beaucoup de collectivités actuellement. Nous avons fait cette démarche en plusieurs temps, d'abord en opérant un diagnostic avec un maximum d'agents du département, en essayant de faire remonter du terrain la plus fine analyse des besoins. Puis nous avons réalisé un baromètre social, soumis à tous les agents, et pour lequel nous avons obtenu un bon taux de réponse. Les cadres se sont également réunis, et avec tous ces éléments, nous avons établi un diagnostic, des lignes directrices de modernisation qui sont devenues 13 chantiers bien distincts. »


Le chantier 12, dédié aux NTIC

Pour ce projet général de modernisation, les treize chantiers démarrent en 2009. Entre autres, s'y trouvent le développement du mode projet, l'amélioration des processus de décision, les délégations de signatures, l'évaluation des politiques publiques, une série sur les RH et la GPEC, une autre sur les contrats de service, et le chantier n° 12 : « Inscrire les services du département dans l'administration 2.0 », piloté par Carole Stromboni avec la direction des systèmes d'information et la direction de la communication. « L'aspect participatif de ce chantier-là est très fort, explique la chargée de projet. Il concerne autant les usagers du département que les agents. »

Deux axes sont définis : il s'agit, d'une part, d'ouvrir les portes de l'administration.
« Nous allons développer les démarches en ligne, améliorer l'accueil téléphonique et l'accueil sur le site internet », détaille Carole Stromboni. Entre autres, une page de Foire aux questions
destinée à répondre aux questions les plus fréquemment posées par les usagers, est en cours de développement. Des cartes interactives et des informations données en temps réel enrichiront également le nouveau site web du conseil général, développé par la direction de la communication. Le modèle suivi est celui du site national www.service-public.fr, décliné en version départementale.

Le second axe est un volet interne, tourné vers une meilleure coordination des services. « Nous comptons améliorer l'infrastructure réseau et informatique pour que les 8 000 agents du département soient bien équipés, explique Carole Stromboni. L'objectif est d'ajouter 900 postes supplémentaires à notre parc informatique existant, pour équiper 5 200 agents au total. Puis nous allons passer au très haut débit sur tout le territoire dans un délai de cinq ans. » Pour Nicolas Soudon, « l'idée était de se dire que l'on n'attendait pas d'être à niveau sur le matériel et les réseaux pour travailler sur des points beaucoup plus innovants. Ce qu'on entend par « Administration 2.0 », c'est comme pour le web 2.0 : des outils personnalisés et participatifs ».
Sur ce point, un outil est en cours de développement : Orchestra, un logiciel open source qui demande juste un navigateur web pour pouvoir être utilisé, va jouer le rôle de facilitateur entre les différents services (voir encadré). Il permettra d'harmoniser les pratiques au sein de la collectivité et d'accéder à l'ensemble des projets en cours depuis une seule et même source. « De cette façon, les informations seront transversalement accessibles, autrement dit plusieurs services travaillant sur un même projet pourront y accéder et partager leurs données, précise Paul Verstraten, chef de projet utilisateur du service des crèches et formateur interne sur Orchestra. Grâce à cet outil, certaines tâches administratives sont dématérialisées et les projets seront gérés via un seul et unique medium. Cela nous permet d'homogénéiser les méthodes, d'acquérir un vocabulaire commun. »

« C'est une vraie demande des agents, explique Carole Stromboni : que les services soient décloisonnés et que l'on soit au courant de ce qui se passe ailleurs dans l'administration. » Pour satisfaire ce v½u, un nouvel intranet a été lancé au début de l'année. Jouant un rôle de facilitateur, il permet d'effectuer des démarches internes en ligne, comme la demande de remboursement des frais de déplacements ou de disposer de modèles de présentation PowerPoint.
Un axe très concret complété par une section informative, dans laquelle figure l'organigramme des services. Un petit journal télévisé interne permettant de prendre connaissance des actualités de l'administration a également été développé.
Enfin, ces démarches de facilitation passent aussi par l'expérimentation d'un parapheur électronique et d'un nouvel outil (WebDélib) pour les rapports et délibérations, des méthodes testées en partenariat avec l'Adullact, l'Association des développeurs et utilistateurs de logiciels libres pour l'administration et les collectivités territoriales.


Proposer des simulations en ligne

Autre outil : l'interface CapDemat, développé à l'origine par le Val-d'Oise, qui permet de créer des démarches en ligne. La Seine-Saint-Denis proposera bientôt sur son site des simulations de prestations sociales, sur le même modèle que le site www.impots.gouv.fr qui permet d'estimer le montant de ses impôts. Le conseil général de Seine-et-Marne propose déjà quelques démarches en ligne, comme la possibilité de remplir la demande de bourse pour les étudiants. Une semaine après le lancement de l'application, plus de 1 000 comptes étaient créés et 500 demandes de bourses enregistrées. La preuve, s'il en fallait, que les démarches par internet sont entrées dans les m½urs (au moins pour la jeune génération), et qu'il est temps pour les administrations d'aller dans le sens de la facilitation des démarches par des interfaces web simples d'utilisation. Le système CapDemat permet donc à l'usager et à l'agent en charge du dossier de suivre la procédure en temps réel et d'interagir dans la plus grande simplicité. Et dès septembre prochain, il sera également possible de déposer des candidatures en ligne et de déposer une demande auprès du médiateur du département directement sur le site.


Réviser sa relation à l'usager

Orchestra, CapDemat pour l'informatique, mais d'une manière plus générale, une volonté de changer complètement la relation à l'usager. « L'organisation des services n'était pas suffisamment orientée usagers, explique Nicolas Soudon. Cette réalité n'était pas volontaire, mais du coup elle nous amène à travailler sur les outils de gestion de la relation au citoyen pour améliorer l'accueil physique et le rendre beaucoup plus qualitatif et homogène. Aujourd'hui il y a beaucoup d'expérience, beaucoup de savoir-faire, mais tous les agents ne vont pas vous offrir la même qualité de renseignement. L'idée est d'avoir un seuil minimal de qualité dans le renseignement de l'usager. Nous travaillons donc l'accueil physique, mais aussi l'accueil téléphonique et l'accueil du troisième type, comme le courrier électronique et pourquoi pas le texto. Tout cela nécessite d'avoir une approche un peu plus globale, avec un système d'information central qui permette de mieux répondre à l'usager. La réflexion sur la modernisation de notre administration doit vraiment être envisagée dans son ensemble. »

Au terme du chantier n° 12, l'usager devrait donc y gagner, tant sur le plan de la recherche d'information (un site internet plus clair et plus riche, un accueil plus performant) que sur le plan des procédures, avec la possibilité de recourir au télépaiement et aux outils de simulation en ligne.


Un calendrier restreint

La majorité des outils de modernisation devraient être mis en service d'ici la fin de l'année. Le lancement du nouveau site internet est prévu pour septembre, et la mise en ligne d'une Foire aux questions devrait avoir lieu en novembre prochain. L'outil open-source CapDemat sera ajouté sur le site internet du département en décembre, permettant ainsi d'effectuer les premières démarches en ligne. En parallèle, une étude en cours débouchera en novembre sur un état des lieux des pratiques internet en Seine-Saint-Denis. De cette manière, les freins d'utilisation des outils 2.0 de la part des usagers seront bien identifiés et l'administration pourra agir pour les estomper : il serait dommage d'avoir développé autant de nouvelles applications pour qu'elles ne soient pas exploitées par la suite...

Enfin, à l'horizon du premier semestre 2011, les cartes interactives et l'information en temps réel devraient être mis en ligne sur le site internet, mais aussi disponibles pour les usagers des smart-phones. Menée tambour battant, cette démarche de modernisation a permis de mettre à plat le fonctionnement général du département et de le repenser en profondeur, pour entrer de plain-pied dans le XXIe siècle.


INTERVIEW

Paul Verstraten
chef de projet utilisateur du service des crèches (Direction de l'enfance et de la famille) et formateur interne sur Orcherstra

Orchestra, un outil de gestion de projet transversal
Quand est né Orchestra ?

P.V.  : Nous avons acquis cet outil il y a six mois. Nous sommes encore dans une phase de modification, notre principale demande auprès de l'éditeur est de simplifier son utilisation, car les fonctionnalités d'Orchestra sont très riches. Plus le logiciel sera limpide, plus on favorisera sa réussite en tant qu'outil de référence en interne.

Qui utilisera cet outil ?
P.V.  : Il y a trois types de rôles : le pilote ou chef de projet, l'acteur ou participant actif du projet, et le lecteur, accompagnateur « intéressé » du projet. Ce dernier statut permet aux élus de s'associer plus facilement à la vie des projets : ils pourront gérer des portefeuilles, suivre la gestion des coûts. Comme Orchestra est interfacé avec le logiciel de comptabilité, il est possible d'avoir une vue instantanée de l'ensemble des projets, avec des tableaux de bord, des graphiques.

Quand sera-t-il utilisé par les agents ?
P.V. : Nous avons choisi de former une quinzaine de formateurs en interne, ces derniers sont presque prêts. Les premières formations auront lieu dès cet été, pour continuer jusqu'en 2011, et nous espérons déployer le logiciel à partir de la rentrée.


Le projet "Administration 2.0" en résumé

- Enjeu : moderniser les outils informatiques et le réseau, dans le but d'améliorer la qualité de l'accueil et du renseignement auprès des usagers et des agents.

- Pour les usagers : développer les démarches en ligne (téléprocédures, télépaiements, simulations d'aides pour les prestations sociales), améliorer l'accueil physique, téléphonique mais aussi par courrier électronique. Offrir un site internet plus fonctionnel et plus clair, donnant accès à des cartes géographiques interactives (crèches, collèges...) et à l'information en temps réel, et doté d'une Foire aux questions centrée sur les événements de la vie des usagers.

- Pour la collectivité : développer les démarches en ligne pour les agents et la dématérialisation des modes de travail, doter les services d'outils collaboratifs performants pour gérer les projets et le quotidien. Développer des espaces collaboratifs afin que les agents puissent organiser la circulation d'information selon leurs besoins. Augmenter le nombre de postes informatiques, raccorder les sites centraux et déconcentrés en très haut débit.


Pour aller plus loin
« Mettre en place des téléprocédures en direction des usagers »
« Logiciels libres et collectivités locales »
« Communiquer avec les outils électroniques : vers une collectivité numérique 2.0 »
Des ouvrages de Territorial Éditions. Sommaire et commande sur http://librairie.territorial.fr

Pour se former :
Utiliser internet dans la gestion de la démocratie participative
Le 15 octobre, Paris
Contact : Céline Vacca, 04 76 65 84 40, celine.vacca@territorial.fr