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La crise et le management symbolique

Article du numéro 373 - 01 février 2009

Management - Tribune

En période de crise, la gestion des hommes prend une importance particulière. Si les managers cherchent à se rassurer eux-mêmes, ils ne doivent pas oublier de s'occuper de leurs troupes, à l'aide d'un management symbolique, mais bien concret.

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Maurice Thévenet est professeur au CNAM, titulaire de la chaire de Gestion des ressources humaines et professeur au département Management d'Essec Business School. Il vient de publier en 2008 une série de six ouvrages aux Éditions Eyrolles : Le Pouvoir, Les Talents, Les Relations Humaines, Le Management, Le Travail et Les Équipes.
maurice.thevenet@club-internet.fr


Les journaux sont remplis d'analyses intelligentes sur la crise, son déroulement et ses causes. Les conseils sur les actions à mener sont plus rares. Pourtant, quelle que soit sa situation économique, toute institution se demande comment faire en cette période de crise pour en diminuer les effets, se protéger et éviter les dommages collatéraux. Il faut agir et vite, disent les dirigeants. D'une part, agir tôt face à la situation et se racheter ainsi de n'avoir rien vu venir. D'autre part, communiquer que l'on est vraiment en crise. Enfin, il faut se donner l'impression de faire quel­que chose, cela réduit aussi l'anxiété compréhensible des responsables.


Rien d'inutile

Agir en période de crise consiste alors à faire du management symbolique. Il ne faut pas entendre par là des actions inutiles, superficielles voire illusoires. Au contraire, le management symbolique est bien réel et comporte au moins trois caractéristiques. La première est d'être visible. On supprime les déplacements et certains projets, on coupe les dépenses, on arrête le « sponsoring », on suspend le recrutement, on revoit la rémunération des dirigeants ou on remet en cause les ­bonus. Les actions de management symbolique sont réelles et concrètes : il n'est qu'à voir les nouvelles règles d'autorisation de dépenses. Concrètes et touchant chacun de manière équivalente et sensible, elles sont donc visibles. La deuxième caractéristique du management symbolique est d'être rapide. Il faut agir dans l'urgence. Par saine protection et anticipation des risques, mais aussi pour ne pas prendre le risque d'être pris en défaut, de ne pas avoir agi alors que tout le monde connaissait la crise. Ainsi, certaines entreprises, avec une très forte activité enregistrée pour l'année qui vient, diminuent leur effectif et leurs principales sour­­ces de dépenses, juste au cas où... Le troisième critère du management symbolique est d'être porteur de sens. Autrement dit, en prenant ce genre de décisions, on communique quelque chose : les temps sont difficiles, chacun va devoir faire des efforts, les dirigeants maîtrisent la situation et agissent.


Une facilité trompeuse

Le management symbolique peut ­paraître assez facile : quelques décisions visibles et concrètes. Plus encore, le corps social est tellement tétanisé dans ces cas-là que les décisions ne semblent rencontrer aucune résistance. Toutefois, il présente quand même plusieurs difficultés. La première, c'est que le ­management est toujours symbolique, qu'on le veuille ou non. Il est nécessaire de prendre des mesures quand la situation est difficile mais sans oublier que les futures décisions, après ce moment tonitruant, porteront tout autant de sens pour les personnes. La seconde, c'est que le management est porteur de sens, mais encore faut-il savoir lequel ? Les entreprises ne vont pas couper les dépenses mais en ­annuler certaines : en fonction de quels critères ? On arrête le recrutement mais pas tous les recrutements : pour quelle compétence division ou projet ? Il n'est pas difficile de couper des budgets ; mais la décision d'investir dans un domaine est autrement porteuse de sens. La troisième difficulté, c'est que le ­management symbolique n'est pas qu'une affaire de direction générale, cela concerne tous les niveaux de ­management. Quand l'incertitude gagne les managers qui se ferment sur eux-mêmes sans chercher à rassurer les personnes, quand ils gèrent leur anxiété par la dérision ou le découragement, ils font aussi du management symbolique. D'ailleurs, quelles que soient les décisions symboliques prises au niveau le plus élevé, c'est l'attitude des managers qui va au final leur donner leur sens.