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50 %: un ratio qui fâche les ingénieurs

Article du numéro 362 - 01 juillet 2008

Avancement

En appliquant un ratio à 50% pour l'avancement au grade d'ingénieur principal, le Grand Lyon s'est attiré la foudre de ses ingénieurs. Après des mois de conflit, une solution est en passe d'être trouvée.

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En février 2007, comme le permettait la loi du 19 février 2007, la communauté urbaine du Grand Lyon décide d'instaurer un ratio à 50 % pour l'avancement au grade d'ingénieur principal. Un choix fait dans « un souci de développement harmonieux entre les filières techniques et administratives », précise-t-on à la DRH, où l'on ­signale qu'avant cette décision, un ingénieur pouvait passer ingénieur principal au bout de quatre à cinq ans alors qu'il fallait huit ans à un attaché pour devenir attaché principal.

Mais voila, le système de ratio à 50 % a fortement ­déplu aux trois cents ingénieurs de la communauté urbaine, qui considèrent ce choix comme « un net recul ». Depuis 1998, l'avancement au grade d'ingénieur principal se faisait de manière systématique. « Il y avait une certaine limite, mais pas comme celle qui existe aujourd'hui », précise Alexandre Breuil, ­ingénieur à la direction de la voirie.

Dès mai 2007, un mouvement de contestation se met en place. En juin, un collectif est créé et une pétition circule, demandant une « révision des ratios garantissant que chaque ingénieur méritant soit promu dès la première année ». Plus de 200 ingénieurs la signent. « Ce qui nous a surtout déplu, c'est cette mise en ­œuvre en catimini, poursuit Alexandre Breuil. On a eu le sentiment que l'administration nous considérait comme des privilégiés et que, maintenant, ça suffisait... »


Un débat crispé dans une CU historiquement construite sur ses services techniques


Mouvement de grève

Le mouvement de contestation se poursuit donc pendant toute l'année : un forum de discussion est mis en place sur le Net, des rencontres sont organisées avec les directions générales et des ressources ­humaines, des courriers sont envoyés à la DRH ainsi qu'au président et au vice-président du Grand Lyon. En vain. Le collectif décide alors d'organiser un mouvement de grève lors de l'élection du nouveau président de la CU.

Les ingénieurs territoriaux sont dès lors un peu mieux entendus et un groupe de travail réunissant des représentants des différentes directions des ­filières techniques et administratives ainsi que la DG et la DRH est mis en place. « On a conscience qu'il ne peut y avoir un retour à 100 % dans un souci d'équité, commente Alexandre Breuil. L'objectif de ce groupe est de définir des critères d'avancement de grades pour qu'à terme il n'y ait plus de système de ratios pour aucune des deux filières. Il faut responsabiliser tout le monde, y compris les évaluateurs. »

Le groupe de travail a donc œuvré dans ce sens. « Ça a été globalement positif car tout le monde s'est bien investi, assure un membre ingénieur du groupe. On a pu constater que beaucoup de points convergeaient, notamment sur l'intérêt d'une évaluation professionnelle. »

Aussi, le groupe de travail vient de faire parvenir à la DG une proposition basée sur un système bâti sur l'acquisition de compétences nécessaires pour être promu principal, tant pour les attachés que pour les ingénieurs. « Le système n'est pas ainsi automatisé. Il permet d'être dans une logique d'examen et non de concours. Il suppose une véritable reconnaissance de la valeur professionnelle, poursuit l'ingénieur. En tout état de cause, ce groupe aura permis de resserrer les liens entre les deux filières et c'est là un point très positif. » À charge maintenant à la DG de prendre sa décision.

De manière plus générale, les ingénieurs de la CU ­déplorent le manque de communication autour de cette réforme. De fait, entre les communications disparates, les syndicats d'un côté, les directions de l'autre, la concertation n'a pas toujours été au rendez-vous. À Lyon, les choses se sont aussi crispées car la CU a été historiquement construite sur ses services techniques. L'évolution de ses compétences l'amène à faire davantage de places aux autres filières, notamment administratives. Ce conflit est la preuve que la cohabitation entre filières n'est pas toujours un long fleuve tranquille.

Jessy Jupin
jesjupin@yahoo.fr


Conseil général de Savoie : promouvoir selon les besoins

Afin d'établir une équité entre la filière technique et ­la filière admi­­nistratives, le conseil ­général de Savoie a décidé de mettre en place un système de ratio « modulable » d'une ­année à l'autre, selon les ­besoins. « Ce que nous souhaitons avant tout, c'est conserver le pyramidage des cadres d'emplois, explique Olivier Ducrocq, DRH. On s'est donc fixé un objectif à cinq ans, afin qu'il y ait toujours autant d'agents sur le grade de base que sur celui d'au-dessus. Pour les ingénieurs, nous avons pesé chaque poste en mettant en place des critères d'évaluation selon le nombre d'agents encadrés, le budget géré, etc. À partir de là, nous avons fixé un grade théorique maximum pour chaque poste. Nous avons communiqué à nos 120 agents concernés le grade maximal qu'ils peuvent occuper sur leur poste. Ce système permet ainsi d'éviter la mise en place « d'une armée de généraux » et d'être toujours en équilibre. »


Surtout, le conseil général a régulièrement communiqué à ses agents ses intentions quant au développement de carrière. « Chez nous, il n'y a pas vraiment eu d'émoi, de pleine contestation par rapport au système mis en place. En effet, bien avant la loi du 19 février 2007, le conseil général a toujours limité l'avancement. Il n'y a donc pas eu de changement brusque pour les ingénieurs territoriaux, poursuit le DRH. Par ailleurs, nous avons mis en place une communication globale entre toutes les filières afin que chacun connaisse le sort de l'autre. Et cette comparaison des filières nous a apporté une certaine paix sociale. »


« Il ne doit pas y avoir de comparaison des filières »

Vice-président de l'Association des ingénieurs territoriaux de France (AITF) chargé de l'animation de la commission carrière, Arnaud Bonnin rappelle que « la mise en place de ratios est un véritable outil de gestion des ressources humaines. Un ratio à 50 % ne permet pas à des gens de qualité d'être promus. On peut par ailleurs imaginer un ratio à 100 %, à condition que derrière il y ait un véritable travail de promotion en terme de grade. Les agents doivent monter en grade non parce qu'ils en ont l'âge ou parce que c'est leur tour, mais parce que la collectivité veut de nouvelles missions, de nouvelles responsabilités. Les ingénieurs principaux doivent ainsi être nommés selon les besoins de la collectivité. C'est une véritable politique de GRH. »


Arnaud Bonnin précise en outre que « les filières technique et administrative sont distinctes. Il ne doit pas y avoir de comparaison ni de règles similaires. Il faut ­manager le corps des ingénieurs à part entière. Il ne doit pas y avoir de lien avec les attachés. C'est pourquoi le système de ratio doit être considéré comme un véritable outil de gestion de ressources humaines et c'est, malheureusement, rarement le cas dans les collectivités. Ce qui, au final, aboutit à des conflits internes et entre les filières. »


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